mardi 7 octobre 2025

Un francophone assimilé n'est plus un francophone...



Ah. les statistiques linguistiques... En principe claires... En pratique trop souvent maquillées, nuancées, parfois trompeuses... au point où l'on peine à distinguer le vrai du faux, le plausible de l'improbable...

À cet égard, je lisais aujourd'hui sur le site Web du Droit un texte fort instructif du journaliste Sébastien Pierroz (Réseau.Presse - Le Droit), portant sur la «sous-utilisation» du Service 3-1-1 de la ville d'Ottawa par les francophones de la capitale canadienne.

Au départ, le texte présente une statistique implacable, incontestable: des 390 190 appels reçus au service municipal 3-1-1 en 2024, on compte 358 486 demandes faites en anglais (91,16% du total), contre 31 704 reçues (8,84%) en français.

L'auteur du texte en conclut à une «sous-utilisation» du service par les francophones en adoptant comme repère identitaire la «première langue officielle parlée» (PLOP), une variable créée par Statistique Canada à partir des données du recensement sur la connaissance des langues officielles, la langue maternelle et la langue la plus souvent parlée à la maison (langue d'usage).

Selon cette variable, que j'estime fort contestable mais que Statistique Canada a choisie comme mesure officielle des collectivités de langue officielle en situation minoritaire, il y aurait près de 155 000 francophones PLOP à Ottawa sur une population totale de 1 006 790 en 2021. Cela donne une proportion de 15,3%.

Si on accepte la validité de cette affirmation, il faut conclure que plus de 40% des «francophones» ottaviens s'adressent en anglais au service bilingue 3-1-1 de la ville. Mais la question se pose. Y a-t-il à Ottawa 15,3% de Franco-Ontariens? Plus? Moins? Ici la bisbille règne!

Selon la Fédération des communautés francophones et acadiennes du Canada, toutes les personnes capables de s'exprimer en français doivent être comptées comme francophones! C'est absolument ahurissant mais avec cette méthode de calcul, il y aurait à Ottawa 37,9% de francophones (381,310 personnes). Un non-sens total!

Pour sa part, en vertu d'un calcul dont le lien avec la réalité m'échappe, l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario (AFO) estime à 795 760 le nombre de Franco-Ontariens, soit 5,6% de la population totale de l'Ontario. Cela ajoute environ 50% au nombre de francophones PLOP établi par Statistique Canada. Avec cette «méthode???», Ottawa compterait plus de 230 000 Franco-Ontariens... Hallucinant!

Si on s'en tient aux données du recensement sur la langue maternelle (la première langue apprise et encore comprise), le nombre de «francophones» de la capitale fédérale dépasse de peu le seuil des 140 000, soit 14% de la population de la ville. Un peu moins que le décompte PLOP, mais correspondant au moins à de vraies réponses faites par les répondants au formulaire du recensement.

Enfin, le nombre d'Ottaviens qui donnent le français comme langue d'usage unique (langue la plus souvent parlée) à la maison se situe à près de 83 000, soit 8,2% de la population. En y ajoutant et en pondérant les réponses multiples (plus d'une langue d'usage à domicile dont le français), on peut ajouter un peu plus de 12 500 personnes, pour un grand total d'environ 95 500, ce qui représente 9,5% de la population totale d'Ottawa.

J'ai toujours considéré la langue d'usage comme meilleur indicateur du nombre véritable de francophones dans une collectivité au Québec et au Canada. Il y a quelque 60 ans, les auteurs de la Commission B-B (bilinguisme et biculturalisme) étaient du même avis.

Cela nous ramène donc au point de départ. Si la langue d'usage constitue effectivement le meilleur critère pour dénombrer les francophones d'ici, alors un taux de 8,84% de demandes en français au service 3-1-1 n'est pas une sous-représentation de la francophonie ottavienne actuelle. Ce serait plutôt un portrait fidèle de ce qui reste de la Franco-Ontarie d'Ottawa...

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De l'autre côté de la rivière des Outaouais, chez moi, à Gatineau qui s'anglicise à vue d'oeil, je serais curieux de connaître la proportion d'appels en anglais à notre service 3-1-1, et de le comparer aux données du recensement de 2021. 







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