mardi 21 février 2017

Une claque en pleine face...


La nouvelle a fait le tour du pays, et vite à part ça... Quand un Anglo-Québécois est obligé d'entendre une réponse en français, du premier ministre fédéral par surcroit, après avoir posé une question en anglais, on est en émoi de l'Atlantique du Pacifique... Et quand, une fois la poussière retombée, Justin Trudeau expédie une lettre de regrets officiels aux anglophones lésés, les manchettes redoublent... Écorcher les oreilles d'un Anglo ainsi, y'a nettement matière à excuses...

L'incident s'était passé à Sherbrooke, le 18 janvier, et dans les rapports publiés le soir même et le lendemain, on mentionnait en fin de texte, en passant, que Justin Trudeau avait, quelques jours auparavant (le 10 ou le 13 janvier), répondu en anglais à une question posée en français, dans la ville ontarienne de Peterborough... Si cette affaire a fait la Une quelque part, tant dans les médias électroniques que dans les journaux, qu'on m'en informe... Quand ça concerne les francophones hors-Québec, c'est comme d'habitude: l'indifférence à peu près générale, teintée au Canada anglais d'un mélange d'irritation et de sourde colère...

Toujours est-il que les deux organismes représentant les Anglo-Québécois (Québec Community Groups Network) et les Franco-Ontariens (L'Assemblée de la francophonie de l'Ontario) ont élevé une protestation commune et adressé ensemble un appel au premier ministre Trudeau, pour lui rappeler «qu'il doit respecter les droits linguistiques» des uns et des autres... Sous le titre «M. Trudeau, répondez-nous dans notre langue s'il-vous-plaît!», la missive a été expédiée le 20 janvier.

Entre-temps, le Commissariat aux langues officielles, même en l'absence d'un Commissaire, avait annoncé qu'il enquêterait sur les deux incidents, celui de Sherbrooke et celui de Peterborough...

Or, voilà qu'on apprend hier, dans les médias de langue française et de langue anglaise, que le premier ministre s'est officiellement excusé auprès des Anglo-Québécois. Même le magazine Macleans, toujours au poste quand il s'agit d'égratigner le Québec français, en a fait un gros titre....

Comme je n'avais pas vu de horde médiatique équivalente pour le pauvre francophone de Peterborough, je me suis dit que j'avais peut-être cherché avec mes yeux d'homme (expression préférée de mon épouse). Alors je tente toutes les combinaisons imaginables de mots clefs pour dénicher le texte sur les excuses du premier ministre aux Franco-Ontariens... et ne trouve rien.

Heureusement il y a Twitter... Je lance LA question qui semble, pour le moment, sans réponse. «Trudeau a-t-il envoyé une lettre d'excuses pour avoir répondu en anglais à un francophone de Peterborough?», en y ajoutant l'adresse Twitter de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario (@MonAssemblee) et celle de la Fédération des communautés francophones et acadiennes (@fcfacanada).

La réponse n'a pas tardé. En début d'après-midi, le compte de l'organisme parapluie des Franco-Ontariens (MonAssemblee) m'adresse le message suivant: «À ce jour, nous n'avons rien reçu.» L'organisme a expédié une réponse similaire à la FCFA et à Martin Normand (@M_Normand), un chercheur post-doctoral spécialiste de la francophonie hors-Québec.

Dire que cet oubli me surprend serait mentir. Les minorités canadiennes-françaises et acadiennes ont toujours été les laissés-pour-compte de la Confédération, et leur sort laisse à peu près tout le monde indifférent, même au Québec. Persécutées pendant les 100 premières années de la Confédération, elles arrachent à coups de pioche et de tribunaux des morceaux de droit qui ont été offerts sur un plateau d'argent, en surabondance, aux Anglo-Québécois depuis 1867.

Alors, que le premier ministre pense aux Anglos du Québec d'abord (sait-on jamais, peut-être finira-t-il par s'excuser aussi auprès des Franco-Ontariens - mieux vaut tard que jamais) constitue la règle depuis 150 ans. Même dans les premiers textes constitutionnels (l'AANB), les Anglo-Québécois étaient la seule minorité protégée, blindée. Mais c'est enrageant tout de même d'être traités si souvent comme des citoyens de second ordre...

Et le plus enrageant, c'est le silence (relatif) des médias, qui accordent la priorité à l'incident de Sherbrooke et relèguent aux derniers paragraphes le rappel d'un épisode similaire à Peterborough, impliquant un francophone cette fois... Nos médias de langue française ne font pas leur boulot dans de telles situations et même Le Devoir, depuis un an, semble se retirer de plus en plus à une distance prudente des grands débats identitaires...

Y'a-tu quéqu'in qui va chialer officiellement? Ou si on va encore une fois jouer aux ti-pitous? Présentement à Toronto et à Ottawa, se déroulent d'intenses débats sur l'islamophobie. Avec raison. Il faut combattre les préjugés et les actes et propos haineux partout. Mais pendant ce temps, nous sommes aux prises depuis 150 ans avec une francophobie tantôt latente, tantôt agressive, d'un océan à l'autre, et cela ne semble pas déranger grand monde ailleurs dans ce pays...

Si effectivement le bureau du premier ministre ne s'est pas excusé aux Franco-Ontariens, nous avons tous reçu, Québécois inclus, une claque en pleine face. Prêts à tourner l'autre joue? Ou...

3 commentaires:

  1. 21 février 2017

    Jean-Paul Perreault s'attend à des excuses de Trudeau

    https://www.facebook.com/imp.francais/posts/1264698133598088?pnref=story

    http://www.lapresse.ca/le-droit/actualites/francophonie/201702/21/01-5071856-jean-paul-perreault-sattend-a-des-excuses-de-trudeau.php

    Si Justin Trudeau s'excuse pour avoir répondu en français à un anglophone au Québec, il devrait en faire autant envers les francophones pour les « pratiques discriminatoires » au sein du gouvernement, estime Jean-Paul Perreault, d'Impératif français.

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    1. «Lisez la lettre (en anglais seulement) du premier ministre adressé au Quebec Community Groups Network.» C'est ce qu'on peut lire sur le site internet du groupe de pression anglophone QCGN (financé à coup de millions par le fédéral à même nos impôts). Le QCGN s'était dit profondément bouleversé et réclamait des excuses de Justin Trudeau pour avoir oser répondre en français à des questions en anglais au Québec. «Vous pouvez être assurés que je ne le ferai plus à l'avenir», a mentionné Justin Trudeau.
      https://www.facebook.com/mariobeaulieu101/photos/a.116621128482642.29778.116562461821842/1015268435284569/?type=3&pnref=story

      http://qcgn.ca/fr/premier-ministre-justin-trudeau-reponse/
      http://qcgn.ca/fr/salle-medias/communiques-de-presse/

      «James Shea, président du Quebec Community Groups Network, se dit satisfait de la réponse du premier ministre. [...] Un rapport préliminaire du commissariat sur les quelque 60 plaintes reçues sera publié dans les prochaines semaines.»
      http://www.lapresse.ca/…/01-5071430-trudeau-sexcuse-davoir-…

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  2. Quelques jours après avoir envoyé une lettre d'excuses au Quebec Community Groups Network, le premier ministre a également écrit à l'AFO… même si l’incident en Ontario s’était produit avant.

    Drôle de coïncidence ??? MDR

    Trudeau s’excuse aussi pour sa réponse en anglais
    24 février 2017
    https://www.facebook.com/tfoONfr/posts/1078361378976179?pnref=story

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