mercredi 16 novembre 2016

McGill… La pointe de l'iceberg...


Un dictionnaire, vous connaissez? C'est ce volume épais que trop peu de gens consultent… Il contient une liste interminable de mots, avec leur définition. Il suffit habituellement d'une petite vérification pour s'assurer qu'un mot ou une expression est employé correctement. Alors permettez-moi de commencer ce texte de blogue par quatre définitions du dictionnaire Larousse. C'est le sens premier de ces mots, celui auquel on les associera le plus promptement.

Enseigner: faire apprendre une science, un art, une discipline à quelqu'un, à un groupe, le lui expliquer en lui donnant des cours, des leçons. 
Enseignement: action, manière d'enseigner.
Cours: ensemble de leçons, de conférences données par un professeur et formant un enseignement.
Cursus: cycle des études universitaires sanctionné par une série de diplômes.

Alors souvenez-vous bien de ces définitions. Elles vous aideront à comprendre le grand mensonge entourant la langue d'enseignement à la future faculté satellite de médecine de Gatineau sous l'autorité de l'Université McGill. Dans un texte publié cette semaine (15 novembre 2016), le quotidien Le Droit reproduit cette dissimulation des faits en lui donnant un statut de vérité factuelle vérifiée. Je cite (voir photo du début): «La proportion de l'enseignement en anglais à la faculté de médecine… sera de 8%.»

Cela correspond aux proportions énoncées par le gouvernement Couillard lors de l'annonce du projet de faculté de médecine au début de septembre 2016. Je cite cette fois une manchette du Droit du 7 septembre 2016, titrée 8% de l'enseignement se fera en anglais. Le journaliste Mathieu Bélanger rapporte ici les propos du premier ministre Couillard lui-même:

Dans le nouveau cursus de l'enseignement de la médecine de McGill, cette formation théorique (en anglais) représente 8% du temps passé en classe par les étudiants, a précisé le premier ministre du Québec, Philippe Couillard. «Je ne vois aucun problème à ce ce que ce soit à 92% en français, a-t-il insisté. Je crois que les étudiants n'y verront aucun problème non plus.»

Essayer de mobiliser les gens en faveur d'une faculté 100% française dans un milieu où la version libérale officielle est le plus souvent parole d'Évangile n'a rien de facile. Voyons donc! 92% en français, de quoi vous plaignez-vous? Et, ajoute-t-on en bons colonisés, on est chanceux, c'est McGill! Le problème (rappelez-vous les définitions), c'est que cela ne correspond pas à la réalité. Mais pas du tout!

Le Droit, dans un texte signé par Justice Mercier, titrait quelques jours plus tard (lundi 12 septembre 2016): 8% du cursus, mais 50% des cours. N'oubliez pas les définitions… Je cite de nouveau:

Pendant les premiers 18 mois du programme de six ans, «les cours en visioconférence, qui seront diffusés à partir de Montréal et qui représentent près de la moitié du temps de formation (j'ajoute une nouvelle définition. Formation: action de donner à quelqu'un, à un groupe, des connaissances nécessaires à l'exercice d'une activité), seront en anglais. L'autre moitié du temps, les étudiants seront appelés à faire notamment de l'apprentissage par résolution de problèmes, ce qui se fera en français avec des ressources locales.»

Dans une lettre au Droit et au Devoir, publiée le 15 septembre dans le quotidien Le Droit, l'Université McGill reconnaît que les cours magistraux donnés présentement pendant les 18 premier mois de la «formation» sont en anglais, mais que cela représente «à peine 8% du cursus». Là ce se précise, et c'est fort différent du spin officiel du gouvernement…



Alors voici la réalité, et vous me direz comment on arrive à ce mythique 8% en anglais ou à ce tout aussi mythique 92% en français…

1. L'enseignement en classe, les cours donnés en matinée par un professeur (la théorie, la base, les fondements de la médecine) durent 18 mois et sont à 100% en anglais. On fait baisser la proportion à 50% en y ajoutant «l'apprentissage par résolution de problèmes» en après-midi. Les devoirs des étudiants, quoi… Ils ont droit de faire leurs devoirs en français… après avoir reçu un enseignement 100% en anglais…

2. Après les premiers 18 mois, les étudiants en médecine entreprennent leur transition à la pratique en milieu clinique, puis passent aux stages suivis de deux années de résidence. On tient pour acquis que cela se fera entièrement en français, sans garanties toutefois… Mais cela n'a rien à voir avec des cours donnés par un enseignant. Peut-être finira-t-on par ajouter d'autres cours à ceux qui existent déjà, après les premiers 18 mois, mais rien n'a été annoncé à cet égard…

3. Et on ne calcule pas dans le 8% d'anglais le temps que les étudiants devront passer à traduire vers le français leur vocabulaire spécialisé appris en anglais, ni les communications qui se feront, tout au moins à l'occasion, en anglais avec les profs, les étudiants de Montréal et l'administration universitaire… 

Que le seul quotidien de langue française de la région de Gatineau continue d'accréditer, même à la fin d'un texte non signé, une version des faits que ses propres journalistes ont prouvée contraire à la réalité, et qu'il a dénoncée en éditorial, est inacceptable. Et les autres médias ne font guère mieux. Sur le site Web de Radio-Canada on évoque toujours ce 8% d'anglais… sans précisions… Récemment, dans une émission de MaTV (Vidéotron), on n'a même pas évoqué la question de la langue d'enseignement, tellement le débat a été obscurci...

La population peut bien être indifférente aux appels en faveur d'une faculté de médecine de langue française (et ailleurs qu'à McGill). Les gens sont peu ou mal ou pas du tout informés. Et les mots perdent leur sens. Quand on mélange dans un bol médiatique cursus, enseignement, formation, cours et j'en passe, on obtient une salade indigeste… La pointe de l'iceberg… Misère…

3 commentaires:

  1. Dans un Québec "normal" tout ce qu'on aurait à savoir, à accepter et à appliquer c'est qu'ici, ça se passe en français.

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  2. Dans un Québec "normal" tout ce qu'on aurait à savoir, à accepter et à appliquer c'est qu'ici, ça se passe en français.

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  3. J’ai de sérieuses réserves concernant l’utilité de cette proposition pour régler l’iniquité du financement des universités francophones.

    Pour ceux qui sont intéressés par la lutte « McGill français » et plus particulièrement, pour la volonté de la faculté de médecine de McGill de s’étendre dans l’Outaouais (@49.10), je vous propose :

    Opposition au MUHC: René Boulanger et Pierre Falardeau, Conférence et discussion sur le projet aussi pharaonique que colonial de l'hôpital universitaire McGill. Mars 2009, lors du 40e de « McGill Français ». À l’époque McGill refusait de partager ses compétences en pédiatrie, en particulier entre Ste-Justine et Montreal Sick Kids !

    https://www.youtube.com/watch?v=irB58OX8p2w&feature=player_embedded



    Bonne question @ 49-51 min, McGill veut former 30 médecins par année à UQO. Voir Montfort à Ottawa. LD


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