Récemment, Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) a mis en ligne la série complète du journal du Rassemblement pour l'indépendance nationale (RIN), intitulé tout simplement «L'indépendance» et publié de 1962 à 1968. Une lecture fascinante qui nous replonge au coeur de la révolution pas si tranquille qui a mis le Québec traditionnel sens dessus dessous...
Comme je suis né et j'ai grandi à Ottawa, j'ai toujours été intéressé par le rôle qu'ont joué les Franco-Ontariens dans l'éclosion de l'indépendantisme des années 1960... Le RIN comptait plusieurs francophones de l'Ontario parmi ses membres fondateurs et l'article ci-dessous, publié dans le numéro de septembre-octobre 1963, fait état de leur présence active et de l'intérêt que suscitent pour les mouvements indépendantistes le sort des Franco-Ontariens, particulièrement en matière de droits scolaires.
Le titre du texte publié en page 16 (le dos du journal) attire immédiatement l'attention: «Les indépendantistes de la région d'Ottawa dénoncent Maurice Lamontagne». Député fédéral d'Outremont et ministre dans le cabinet libéral de Lester Pearson, M. Lamontagne avait dénoncé les «séparatistes» au congrès de l'Association canadienne-française d'éducation de l'Ontario (ACFEO) en 1962.
Les sections outaouaises du RIN et du PRQ (Parti républicain du Québec) ont répliqué ainsi à l'intervention du ministre fédéral:
«S'efforçant de diviser notre nation, selon une stratégie classique, le ministre (Lamontagne) a déclaré (devant l'ACFEO) ceci: "Vous n'ignorez pas sans doute que les séparatistes québécois parlent toujours avec un certain mépris de la vie française en Ontario. À les entendre, on serait porté à croire que les Franco-Ontariens ne sont que des Canadiens français de seconde classe, qui ne font que survivre avant de trahir définitivement leur langue et leur culture."
«Au fait, nos sections du PRQ et du RIN comptent dans leurs rangs une forte proportion de Franco-Ontariens, et ne cessent de prêcher une solidarité englobant d'abord les Canadiens français du Québec, de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick, puis ceux des autres provinces, et enfin les francophones du monde entier.
«Cette attitude, entièrement positive, ne s'accompagne d'aucune hostilité envers les autres collectivités linguistiques.
«Le RIN et le PRQ considèrent les Franco-Ontariens comme des leurs, mais ne peuvent s'empêcher de ressentir une profonde tristesse devant les difficultés auxquelles ceux-ci sont en butte. M. Lamontagne, dont le souci pour la langue française remonte aux premiers succès d'opinion des mouvements séparatistes, ne saurait nier lui non plus que la vie française des Franco-Ontariens est infiniment plus difficile que si elle pouvait s'appuyer sur un système d'enseignement complet.
«Et la situation de nos frères ontariens serait beaucoup moins précaire si M. Lamontagne et ses amis s'étaient avisés plus tôt de l'inégalité scolaire dont les Canadiens français sont victimes au Canada, hors du Québec.»
Le journal du RIN avait consacré un article, en 1962, au livre de Joseph Costisella intitulé «Le scandale des écoles séparées en Ontario». Ces liens entre les indépendantistes québécois du début des années 1960 et de nombreux sympathisants franco-ontariens feraient l'objet d'une belle recherche. Il y a même eu un membre franco-ontarien du FLQ...
Si j'étais plus jeune, j'entreprendrais la rédaction d'un livre là-dessus...
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