photo de Radio-Canada
Y aura-il ou non un nouvel hôpital dans l'Outaouais urbain? Autant discuter du sexe des anges, dans une région où pour plusieurs, simplement décrocher un médecin de famille équivaut à gagner le gros lot de la 6/49...
Pendant que nos savants bureaucrates planchent sur l'échéancier d'une bonification de l'offre hospitalière à Gatineau, les établissements existants - souvent faute de personnel suffisant - peinent à remplir leur mission de base d'assurer de bons soins dans des délais acceptables...
Lundi, 31 août... J'accompagne un proche à l'urgence de l'hôpital de Gatineau, une installation récente et ultra-moderne... Arrivés près des portes de l'urgence, il faut s'arrêter à deux mètres d'une table où des membres du personnel vous posent des questions sur la COVID au lieu de vous laisser passer immédiatement au triage.
Ça je peux comprendre, avec la pandémie. Et on nous offre un fauteuil roulant, fort apprécié et nécessaire. Mais une fois le formulaire rempli, on ne nous laisse pas entrer... Il faut emprunter un détour et utiliser une porte de côté située dans la «zone verte», un itinéraire très mal adapté aux fauteuils roulants qui doivent franchir trois ou quatre obstacles de taille...
Il faut d'abord, au bout du trottoir, descendre sur une piste de terre ou sur l'entrée asphaltée des ambulances où le fauteuil roulant bute sur toute dénivellation... Arrivé près de la porte de la «zone verte», on doit tenter de monter une marche sans rampe réglementaire... Impossible de manoeuvrer avec cette petite rampe à pic, bloqué de nouveau à la porte, le patient doit se lever et marcher pour que le fauteuil roulant puisse avancer...
Et cela dure depuis des mois... Les jours d'un scrutin municipal, provincial ou fédéral, on s'assure d'installer pour cette seule journée de longues rampes à pente douce, conforme à la réglementation. Pourquoi ne peut-on pas faire de même à l'entrée de l'urgence dans un des deux hôpitaux de la quatrième ville du Québec?
Enfin, les problèmes ne font que commencer pour un malade qui arrive à l'urgence... Tout va très vite si la vie d'une personne est en danger mais autrement, on se retrouve sur une liste d'attente dans une salle d'attente bondée... Là tout concept d'urgence disparaît... Je veux bien croire que certaines des personnes présentes auraient pu aller à une clinique, mais la majorité sont là parce qu'elles ont besoin de soins urgents, qu'elles n'auront pas...
Bien sûr il faut agir avec célérité quand l'intervention s'impose dans les secondes ou les minutes qui suivent, mais comment expliquer que pour les autres cas urgents-mais-moins-urgents, on puisse accepter comme normal de poireauter dans des salles d'attente plus ou moins confortables pendant trois, quatre, cinq, dix heures et même plus?
Ce lundi, 31 août, vers 19 heures, on jase avec une dame qui s'est pointée à l'urgence huit heures plus tôt, et qui ne semble pas espérer d'être appelée de si tôt... La personne que j'accompagne, qui a besoin de prises de sang immédiates, a été informée que cela ne se ferait pas avant tard la nuit... On se prépare pour un long séjour, et j'observe ce qui se passe autour de moi...
Les bruits courent (habituellement fondés) que les civières à l'urgence ont un taux d'occupation de 140%... On voit les ambulances arriver à un rythme parfois inquiétant, chacune avec son nouveau patient pour l'urgence... À un certain moment, une infirmière se plante à la croisée des salles d'attente et lit une liste de 20 et quelques noms de personnes, pas pour les informer qu'elles seront bientôt soignées mais pour savoir si elles sont toujours là... Ciel...
L'infirmière répète la manoeuvre une seconde fois, puis une troisième en annonçant qu'il s'agit du dernier rappel pour ceux qui n'ont pas répondu «présent»... Je présume qu'ils ont été rayés de la liste et qu'ils ont eu une bien mauvaise surprise s'ils sont revenus à la salle d'attente par la suite...
Après quelques heures de plus, j'ai entendu l'appel de seulement deux noms de la liste... À ce rythme les derniers passeront aux soins le lendemain... Paraîtrait qu'il n'y a qu'un seul médecin à l'urgence de Gatineau pour s'occuper des cas super urgents, moyennement urgents et autres-nuances-d'urgent... De fait, vu la lenteur du processus, cela me paraît l'évidence même...
Pourquoi n'y a-t-il pas plus de médecins soignants à l'urgence? Voilà bien la question de l'heure... parce que selon les données, des médecins, on en trouve un peu partout... Alors l'embouteillage semble se trouver là, et le pauvre urgentologue doit se débrouiller seul, acheminant au compte-gouttes patient sur patient à un personnel infirmier compétent et dévoué qui ne peut qu'attendre...
Le résultat? Après plusieurs heures d'attente, des malades qui auraient dû recevoir des soins se découragent et s'en vont... D'autres quittent et tentent leur chance à un autre hôpital qu'ils espèrent moins bondé... Après cinq heures dans ce milieu plus que déprimant, à la fois découragés et mécontents, nous abandonnons nous aussi...
Alors quand les politiciens et bureaucrates se lancent dans de grands débats sur la construction d'un nouvel hôpital, puis-je leur proposer d'aller passer une soirée et une nuit dans une urgence hospitalière de Gatineau. Trois médecins à l'urgence au lieu d'un régleraient plus de problèmes qu'un nième rapport sur l'état des services de santé en Outaouais...
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