vendredi 15 avril 2022

Vendredi Saint, 15 avril 2022

image de mon missel d'enfance

Vendredi Saint, 15 avril 2022... Journée largement comme les autres à Gatineau... Magasins ouverts, comme à l'habitude... Bizarre, de l'autre côté de la rivière des Outaouais, dans cet Ontario anglais et protestant, c'est férié... Chez nous sur la rive québécoise, les églises catholiques tombent comme des dominos... La mienne, St-René Goupil, a été vendue à un quelconque groupe biblique... Mon ancienne paroisse, qui porte le même nom, n'existe plus... Cet après-midi, les fidèles qui restent se rassembleront sans doute dans les églises qui restent...

Je n'ai jamais vraiment été croyant, même si j'ai grandi à une époque où la religion catholique était omniprésente dans nos vies. J'ai toujours été un «douteux». Une des raisons, sans doute, pour laquelle je suis devenu journaliste. Mais j'ai toujours été attiré, fasciné, par le grand cérémonial de la mort et la résurrection de Jésus Christ. J'imagine que je voulais y croire sans y parvenir. Disons que j'espérais que toute cette histoire soit vraie. Oui, j'étais et je demeure un «espérant».

Pendant trois ans, de 1955 à 1958, à la paroisse Notre-Dame des Anges, à Ottawa, j'ai servi la messe comme enfant de chœur. J'ai conservé le petit «Missel des dimanches» en latin et en français que mes parents m'avaient offert à l'âge de 9 ans. En le feuilletant, je me suis souvenu de l'ambiance très spéciale de l'Office du Vendredi Saint, seul jour de l'année où il n'y avait pas de messe et l'un des rares moments où le prêtre célébrant sortait des grands tiroirs de la sacristie les vêtements sacerdotaux noirs. Ou étaient-ce les rouges?

La cérémonie du Vendredi Saint avait lieu vers 3 heures de l'après-midi, l'heure où, dans notre esprit, le Christ crucifié avait rendu l'âme. Tous les enfants de choeur étaient mobilisés, et l'église était pleine à craquer pour environ une heure et demie de lectures y compris la passion de Jésus au grand complet. Assis, debout, à genoux, assis, debout, à genoux... De plus, nos estomacs grondaient un peu parce que c'était «maigre et jeûne»... LA journée où on ne mangeait ni viande ni gâteries. Mais ça restait grandiose, solennel, mystérieux. Important.

Le plus spectaculaire, c'était l'adoration de la Croix, un immense crucifix - en tout cas il nous semblait immense - qui était resté voilé depuis le dimanche de la Passion. Le célébrant la découvrait en trois étapes - le haut d'abord, puis un des bras, puis La Croix entière. Après, on la déposait sur un coussin devant les fidèles qui, un à un, allaient embrasser les pieds du Christ dans un geste d'adoration. Pas sûr qu'on ferait ça aujourd'hui avec la COVID...

À l'âge de 10 ou 11 ans, nous étions vaguement conscients, sans vraiment comprendre, que la fin de semaine pascale était le moment clé de la religion chrétienne, bien plus que Noël. Sans la mort et la résurrection de Jésus Christ, les évangiles n'étaient guère plus que le rappel des faits et gestes d'un humain comme les autres. Une belle histoire, certes, inspirante, mais pas celle de Dieu s'incarnant dans un humain. Et même enfant, nous étions tous un peu comme Saint Thomas. Nous n'étions pas là à Jérusalem, un peu après l'an zéro de l'ère chrétienne. Nous n'avions pas vu. Moi, et d'autres, n'avions pas de certitude.

Aujourd'hui, à 75 ans, j'ai les mêmes doutes. J'aimerais avoir la foi mais elle reste hors d'atteinte. J'adhère cependant au coeur du message des évangiles - l'amour de Dieu (de la perfection) et surtout, l'amour du prochain. Personne, depuis Jésus, n'a proposé de meilleur itinéraire de vie pour l'humanité. L'amour du prochain mettrait fin aux inégalités, assurerait la justice, la fraternité, la liberté et la paix dans le monde. Je doute qu'on puisse un jour y arriver, mais je l'espère.

Je me disais, enfant, qu'un jour, pendant une grande cérémonie pascale, il se produirait quelque chose qui me donnerait la certitude qui m'échappait, la foi. Ce n'est pas arrivé, et comme je ne pratique plus, il y a peu de chance que la foudre divine me frappe avant mon arrivée au terminus. Mais on ne sait jamais. Douter, c'est l'absence de certitude. Je ne suis pas sûr que Dieu existe mais par le même raisonnement, je n'ai pas la certitude qu'il n'existe pas. Je continue d'espérer.



1 commentaire:

  1. Bonjour,
    Tes souvenirs correspondent en tous points aux miens. Pas surprenant. Nous avons presque le même âge.

    J'aurais dû garder mon missel, surtout celui de mon père écrit en latin et en français côte à côte.

    "Je continue d'espérer"... comme tous les Québécois d'ailleurs, même s'ils n'en sont pas conscients. Les gens ses sont détachés de la religion catholique, mais la quête de sens et la spiritualité restent.

    Claude Laurin (nous avons quelques amis en commun; et je suis le conjoint de Monique Larouche que tu as connue dans une autre vie).

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