mercredi 25 mai 2022

Terrée dans son chalet...

Que faut-il penser d'une ville où les dirigeants, absents du radar pour près de 48 heures après une tempête dévastatrice, finissent par convoquer la presse pour parler d'inondations possibles (mais incertaines) la fin de semaine suivante?

Dans le sillage du derecho (c'est le nom du phénomène qui nous a frappés) de samedi après-midi, 21 mai, des pans entiers des villes d'Ottawa et Gatineau, ainsi que des villes et villages environnants, se sont retrouvés sans électricité dans un décor de zone sinistrée - toits arrachés, endommagés, arbres et branches jonchant le sol partout.

Les services d'urgence des municipalités ont été débordés d'appels en fin  de journée et très vite, l'ampleur des dégâts est devenue apparente. Dès le lendemain, à Ottawa, le maire Jim Watson était au front et la ville avait ouvert des centres d'accueil pour accueillir les citoyens des nombreux quartiers en panne.

Pendant ce temps, à Gatineau, en face, quatrième ville du Québec, silence... Bien sûr, les équipes des travaux publics municipaux et les camions d'Hydro-Québec sillonnaient les routes pour entreprendre les longs travaux de nettoyage et de rebranchements, mais au sommet de la hiérarchie du pouvoir, c'était le vide!

Mme la maire France Bélisle était à son chalet et n'a pas jugé bon de rentrer en ville, même par simple solidarité avec tous ces milliers de citoyens qui l'ont élue pour les représenter. Les faibles motifs qu'elle a proposés à la presse, deux jours après la tempête, étaient pénibles à entendre.

Affirmant qu'elle avait travaillé toute la fin de semaine, la maire a ajouté: «C'est sûrement la meilleure chose que je reste là-bas, parce que j'avais de l'électricité, alors que dans mon domicile en ville je n'en avais pas. Ça m'a permis de rester active.» Ue réponse qui a de quoi étonner!

D'abord si je m'étais trouvé à un chalet ayant de l'électricité après le passage des orages mais que ma résidence en ville était dans un secteur de panne, je serais revenu chez moi rapidement pour vérifier les dommages possibles, protéger la nourriture au frigo ou au congélateur, etc. Et aussi, pour partager la misère de la population que je dirige. Enfin, chacun sa façon...

Mais le pire, c'est de nous laisser croire qu'elle pouvait rester active parce qu'il y avait du courant au chalet. Non mais pensait-elle vraiment que son travail en ville s'effectuerait de sa maison sans courant? Madame le maire se serait plutôt rendue à l'hôtel de ville où, sans s'ingérer dans les travaux des employés sur le terrain, elle aurait assumé la direction politique des opérations et assuré les coordinations requises. Elle aurait aussi pris le temps d'aller voir, sur place, des quartiers touchés: il me semble qu'on est en droit d'attendre au moins ça d'un leader municipal.

Au lieu de foncer au front avec ses concitoyens, la maire s'est contentée d'une position d'attente. «Si on a besoin de moi pour accorder des autorisations, il faut que je sois disponible pour les accorder. Et c'est ce que j'a fait», a-t-elle dit. Mais la situation exigeait qu'elle exerce en pleine ville son rôle de maire, de dirigeante, de porte-étendard de Gatineau. Pour ça elle n'était pas disponible, terrée dans son chalet.

Alors qu'Ottawa ouvrait des centres de répit pour ses citoyens sans courant une douzaine d'heures après la tempête, Gatineau a attendu deux jours! «Ce n’est pas parce que la mairesse est à son chalet et que la mairesse est assise sur son divan qu’elle ne joue pas son rôle de mairesse», a déclaré Mme Bélisle lundi (ou mardi). Vraiment?

La pire explication donnée par la maire était celle-ci: la Ville, a-t-il dit, devait s'occuper en même temps des pannes de courant et «d'un réservoir qui déborde». Elle est bien bonne. D'abord le réservoir Baskatong, plus de 100 km au nord, est administré par Hydro-Québec, pas la ville, et il ne déborde pas... du moins pas de façon majeure pour le moment. La seule urgence en fin de semaine, c'étaient les dégâts causés par la tempête de samedi et les pannes de courant.

La conférence de presse municipale du lundi 23 mai visait à avertir les citoyens de possibles inondations graves à venir s'i y a beaucoup de pluie durant la semaine et qu'Hydro-Québec doit ouvrir les vannes du barrage Mercier, au nord de Maniwaki. Bien des citoyens n'y croient pas, mais enfin, cela pourrait arriver. Reste que la maire Bélisle était là pour une conférence médiatique du type «au cas où», mais absente du feu de l'action les jours précédents. 

Le comble, c'est qu'elle a pris le temps de faire la morale aux citoyens, leur rappelant que la sécurité civile, c'est l'affaire de tous. «On a des citoyens qui, s’ils ne l’ont pas encore compris, doivent s’équiper à la maison pour survivre 72 heures. Avec de la nourriture non périssable et de l’eau. Les citoyens doivent être en mesure de mettre des mesures en place», a-t-elle déclaré.

Il semble aussi qu'il y en a qui n'ont pas compris que la maire d'une grande ville ne passe pas la fin de semaine au chalet quand le ciel tombe sur la tête de ses concitoyens.


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