vendredi 24 janvier 2020

Université de l'Ontario français: un mensonge historique...


La ministre fédérale des Langues officielles, Mélanie Joly, a qualifié de jour «historique» (voir bit.ly/37n4S9O) pour la francophonie canadienne la conclusion d'un accord fédéral-Ontario permettant de financer un campus universitaire de langue française à Toronto (faussement appelé Université de l'Ontario français). En réalité, l'interprétation qu'elle donne à l'accord se rapproche davantage d'un «mensonge historique»...

La ministre ontarienne des Affaires francophones, Caroline Mulroney, a fait une déclaration tout aussi insidieuse. «Vous le savez, a-t-elle dit, c'est une revendication de très longue date de la communauté francophone de l'Ontario d'avoir une université gouvernée pour les francophones et par les francophones.» (voir bit.ly/30ILJwy) Au sens littéral, cette affirmation n'est pas fausse, mais elle s'éloigne de la vérité par ce qu'elle laisse entendre.

Le message livré par les deux ministres, c'est que ce campus universitaire à Toronto EST véritablement l'Université de l'Ontario français réclamée depuis plus d'un demi-siècle, et particulièrement depuis 2012, par diverses organisations de la collectivité franco-ontarienne. Ce serait l'évidence même... «Vous le savez», lance Mme Mulroney... Et à voir les réactions médiatiques, le coup a réussi. Des félicitations et des tapes dans le dos à gauche et à droite...

Malheureusement, la réalité est tout autre! Bien sûr, l'annonce de l'ouverture d'un petit campus universitaire à Toronto constitue en soi une bonne nouvelle, mais cela n'a rien à voir avec le projet d'université franco-ontarienne défendu depuis huit ans par le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO) et ses partenaires, la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO et l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario (AFO).

L'enjeu primordial de ce combat, c'est la gouvernance, bien plus que le simple accès à davantage de programmes d'études en français. Entre les années 1960 et 1990, dans un contexte politique et juridique volatile où les revendications autonomistes du Québec ont pesé lourd, l'Ontario français a réussi à s'imposer comme gestionnaire de ses réseaux éducatifs au primaire, au secondaire et au collégial. Ne restait que l'universitaire, où l'immense majorité des étudiants francophones fréquentaient (et fréquentent toujours) deux universités bilingues à majorité anglophone, l'Université d'Ottawa et l'Université Laurentienne (à Sudbury).

L'Université de l'Ontario français devait être la structure parapluie assurant la gouvernance de l'ensemble des programmes d'études universitaires en français de l'Ontario, dont ceux de nouveaux campus comme celui de Toronto, mais aussi - et surtout - ceux qui attirent une quinzaine de milliers d'étudiants francophones à Ottawa, Sudbury et Hearst. Le RÉFO et ses partenaires l'ont clairement affirmé à plusieurs reprises depuis 2012.

Dans le sillage des feux d'artifice fédéraux-provinciaux des derniers jours, peu de gens ont noté le bémol exprimé par le Regroupement étudiant franco-ontarien. L'arrivée du campus francophone à Toronto, disait Marie-Pierre Héroux, présidente du RÉFO, «permettra de nous rapprocher du désir largement exprimé par notre communauté d'avoir une gouvernance des programmes postsecondaires francophones par et pour nos communautés».

Encore une fois, les médias semblent s'être contentés de servir de courroies de transmission à un mensonge qui, à force d'être répété, semble être devenu crédible... voire une évidence pour certains... À force de répéter - et cela a commencé avec les libéraux de Kathleen Wynne - que le campus de langue française de Toronto incarne l'Université de l'Ontario français, les gens (y compris les journalistes) ont fini par le croire...

Se trouvera-t-il quelqu'un, au sein de la collectivité franco-ontarienne ou dans les médias, pour remettre les pendules à l'heure? Si on ne le fait pas, et ce, de façon énergique, la population étudiante franco-ontarienne sera condamnée pour longtemps (pour toujours?) à fréquenter des institutions bilingues anglicisantes comme l'Université d'Ottawa et l'Université Laurentienne...

Et le Regroupement étudiant franco-ontarien, ainsi que ses prédécesseurs, auront mené un combat futile...






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