Que Le Devoir choisisse,
dans ses pages d'opinion, de glisser lentement sur la pente du
multiculturalisme à l'anglo-canadienne, c'est son affaire. Que notre quotidien
national laisse de plus en plus tomber la nation qui lui a donné vie, cela me
déçoit mais il s'agit d'un choix éditorial que je dois respecter tout en
conservant ma liberté de le critiquer. Ce qui me hérisse, cependant, comme
journaliste, c'est que l'on puisse tolérer des erreurs de fait sans les
corriger et s'en excuser.
Dans son texte intitulé La pensée unique (bit.ly/39hcfjX), publié le 5 février 2020, quelques jours après le troisième anniversaire de l'attentat meurtrier contre la mosquée de Québec, la chroniqueure Francine Pelletier écrit: «De 2016 à 2017, les actes haineux ont explosé partout au Canada, mais nulle part plus qu’au Québec — à l’égard des musulmans notamment. Selon Statistique Canada, il y a eu une augmentation des crimes haineux de 49 % au Québec, contre 47 % pour l’ensemble du pays.» Sur sa lancée, elle ajoute que dans la foulée de la tuerie à la mosquée de Québec, «les incidents islamophobes ont triplé dans la province».
Pourtant, Statistique Canada, auteur de cette compilation de crimes haineux (bit.ly/2ud3Y1C), indique que «parmi les provinces, l’augmentation globale la plus marquée du nombre de crimes haineux déclarés par la police a été observée en Ontario — la province la plus peuplée du Canada —, où le nombre d’affaires de crimes haineux est passé de 612 en 2016 à 1 023 en 2017 (+67 %). Cette croissance est en grande partie liée à l’augmentation du nombre de crimes motivés par la haine à l’égard des musulmans (+207 %), des Noirs (+84 %) et des juifs (+41 %).»
Par ailleurs, la même étude de Statistique Canada confirme qu'au Québec, le nombre de crimes haineux contre des musulmans «a presque triplé pour passer de 41 en 2016 à 117 en 2017». C'est une hausse de 187%. Ce que l'agence fédérale ajoute, cependant, c'est que ces mêmes crimes haineux contre des musulmans ont plus que triplé en Ontario, pour un bond de 207%. Je ne dispute pas le caractère faramineux de ces hausses, mais le «nulle part plus qu'au Québec» n'est pas démontré.
Le taux de crime haineux par 100 000 habitants est aussi considérablement plus élevé en Ontario, à 7,2 (contre 5,8 au Québec et une moyenne canadienne de 5,7). Si l'on considère les régions urbaines du pays, la ville championne pour les crimes haineux est Thunder Bay, Ontario avec un taux de 17,6 crimes haineux par 100 000 habitants. Elle est suivie, dans l'ordre, par Hamilton (Ontario), Guelph (Ontario), la ville de Québec, Peterborough (Ontario), Kitchener (Ontario), Ottawa (Ontario), Toronto (Ontario), Kingston (Ontario), Montréal (Québec) et Vancouver (C.-B.). Les taux des autres villes sont inférieurs à la moyenne canadienne.
Forte de sa prémisse contestable, la
chroniqueure du Devoir en rajoute: «On pourrait même, écrit-elle, soupçonner
le Québec d'être l'un des endroits en Amérique où les préjugés antimusulmans
sont les plus tenaces». Cette allégation est d'autant plus douteuse qu'il
reste à démontrer la véritable nature de cette soi-disant «haine». Vise-t-elle
l'islam ou l'islamisme, les musulmans ou les islamistes? (voir bit.ly/39nwVqf) Est-ce
bien une forme de xénophobie ou une réaction viscérale, souvent irréfléchie,
d'un peuple déjà menacé face à une perception de radicalisme et d'intolérance
dirigés contre sa culture et ses traditions?
Le peuple visé le plus souvent par des «crimes haineux» depuis la Confédération, c'est nous. Les francophones. Partout au pays, même au Québec. À tous les jours, dans les réseaux sociaux, dans les médias de langue anglaise, on tient à notre endroit des propos diffamatoires et haineux. Les recenser est un jeu d'enfant. Le problème, c'est qu'ils ne correspondent pas à la définition canadienne de crime haineux. Les dénigrements parfois violents qu'on nous dirige, s'ils étaient proférés contre la collectivité juive ou musulmane, ou contre des gens d'autres races, vaudraient à leurs auteurs des accusations criminelles d'incitation à la haine.
Mais au Canada, la chasse aux francophones
est toujours ouverte...
Merci pour votre vigilance, nous permettant d'accéder à des analyses socio-politiques approfondies. Cela nous permet de combattre efficacement les fausses nouvelles!
RépondreEffacerMerci pour cette mise au point factuel et précise ! il est grand temps de créer un sondage Québécois sur nos opinion face a la religion : Les Québécois veulent tout simplement la paix et le retrait de TOUTE les religions de nos sphères , et ne veulent surtout pas financer les nouvelles religions qui se développent
RépondreEffacerMerci de remettre les pendules à l’heure, nous vivons dans un monde où l’information est devenue comme les restaurants rapides. C’est-à-dire diffuser l’information accrocheuse, pour une digestion intellectuelle superficielle. Sans trop se demander sur quelle source sérieuse est basé l’article.
RépondreEffacerNous avons une responsabilité comme citoyen et citoyenne avant de croquer à pleine dent dans l’information, nous avons la responsabilité de comprendre et savoir, que de croire et ignorer. Ce que je veux dire, c’est de valider les sources d’informations mêmes les plus crédibles avant de nous forger une opinion trop rapidement qui accentuent une nouvelle incomplète qui alimente une vision qui ne reflète pas la réalité de la population en générale.
Je ne minimise pas l’explosion des crimes haineux bien au contraire. Cependant, au regard de la réalité canadienne, sous-entendre qu’au Québec <> me laisse perplexe sur l’objectif d’une telle affirmation.
Merci. Juste et triste. Les québécois n'ont jamais été aussi divisés. On est en marche vers l'assimilation de notre nation.
RépondreEffacerhttps://revueliberte.ca/article/1430/Ma%C3%AEtres_chez_l_Autre
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