dimanche 16 février 2020

Le Québec français court au suicide...


Si les Québécois se donnaient la peine de s'informer - vraiment s'informer - des combats menés ailleurs au pays depuis plus de 150 ans pour défendre et promouvoir la langue française, et en tiraient les enseignements qui s'imposent, la Loi 101 retrouverait vite, très vite, toute sa vigueur originale. Elle serait même renforcée. Et dans ce Québec de 2020, la langue et la culture françaises seraient traitées avec beaucoup plus de dignité et de respect.

Allez demander aux Franco-Ontariens, là où sont mes racines, comment ils accueilleraient un programme d'anglais intensif dans leurs écoles françaises, ou des programmes en français dans une institution scolaire de langue anglaise ou à majorité anglophone. Ils vous diraient qu'ils ont déjà subi tout ça pendant près d'un siècle et plus, et que le résultat est toujours le même: une anglicisation - lente ou rapide selon les régions - des jeunes générations franco-ontariennes.

Ils vous parleraient de la nécessité du «par et pour»... une expression peu entendue au Québec mais qui prend tout son sens en milieu minoritaire. Il s'agit, en l'occurrence, d'écoles gérées «par» les francophones, «pour» les francophones. Des institutions scolaires que la collectivité francophone contrôle et administre, et dont le principal objectif est d'être au service de cette collectivité. C'est le coeur de la revendication actuelle d'une université ontarienne de langue française, comme ce le fut pour les réseaux d'écoles, primaires, secondaires et collégiales.

L'immense majorité des étudiants universitaires franco-ontariens fréquentent deux grandes institutions bilingues - l'Université d'Ottawa et l'Université Laurentienne à Sudbury - où ils sont fortement minoritaires. Ils étudient en français dans un environnement anglo-dominant, avec des conséquences prévisibles. C'est un peu le régime qu'on s'apprête à imposer, au Québec, aux étudiants de l'Outaouais en médecine, qui auront enfin finalement «droit» à des cours en français mais qui évolueront à McGill, une université administrée «par» et «pour» la collectivité anglo-québécoise.

Les Franco-Ontariens vous diraient que la «bilinguisation» collective des écoles françaises n'a pas que de sérieuses conséquences pour la qualité, voire la pérennité, de la langue française. Elle a aussi de graves effets identitaires, avec une jeune génération qui se voit de plus en plus comme «bilingue» et non comme francophone. Ne vous surprenez pas d'apprendre que dans les écoles primaires franco-ontariennes, on en soit rendu à mettre sur pied des programmes de «construction identitaire» pour sauver les meubles...

Les minorités canadiennes-françaises et acadiennes ont besoin d'un Québec français, fort et dynamique, comme point d'appui. Si on leur demandait ce qu'elles pensent de l'anglais intensif au primaire, des programmes en anglais dans des cégeps et universités de langue française, des cours en français sous gestion d'une université anglaise, elles vous diraient que le Québec francophone court au suicide. Et elles auraient raison. Mais leur expérience ne semble pas intéresser les Québécois...

Le gouvernement Legault, en partenariat avec la Fédération des communautés francophones et acadiennes (FCFA) des autres provinces, a organisé un Sommet sur le rapprochement des francophonies canadiennes, qui aura lieu les 16 et 17 juin à Québec. C'est la première rencontre du genre depuis les États généraux du Canada français à la fin des années 1960. Souhaitons que le dialogue engendré par ce Sommet puisse non seulement profiter aux minorités francophones hors-Québec, mais aussi à la majorité francophone du Québec, si cette dernière se donne la peine  d'être à l'écoute du vécu de sa diaspora.










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