samedi 29 février 2020

«L'armée contre les civils»... De Trudeau père à Trudeau fils...

Le matin des mesures de guerre à Montréal, 1970...

En marge de la crise autochtone de 2020, de nombreux commentateurs ont insisté sur le contraste entre Justin Trudeau et son père Pierre Elliott qui, semble-t-on croire, aurait agi de façon beaucoup plus vigoureuse et décisive que son fils faiblot...

Devant sa déclaration qu'«on utilise pas l'armée contre les civils», on ne peut s'empêcher de penser à la crise d'octobre 1970, alors que Trudeau père avait décidé d'utiliser l'armée (et la Loi sur les mesures de guerre) pour tenter de mater le FLQ et, du même coup, asséner un coup qu'il espérait fatal au mouvement indépendantiste québécois en emprisonnant près de 500 civils innocents.

Pierre Elliott combattait le nationalisme québécois, tel qu'il le percevait, depuis l'époque de Duplessis. Sa vision d'un nationalisme québécois conservateur, replié sur soi, était incrustée et immuable. J'ai la conviction que l'apparition d'un nationalisme progressiste et indépendantiste au début des années 1960 l'a traumatisé, au point de le pousser à poursuivre la lutte dans l'arène fédérale. Les Anglo-Canadiens ont immédiatement compris, voyant en lui cette féroce volonté de mettre la «nation» québécoise à sa place...

Trudeau père était plus complexe que son fils. Sur le plan intellectuel, il était essentiellement citoyen du monde, presque un apatride. Sur le plan des convictions, il était Canadien d'adoption et, à ce titre, plus catholique que le pape... Mais sur le plan identitaire profond, il est resté Québécois pur laine, jusque dans ses tripes. Au référendum de 1980, son NON était aussi authentiquement québécois que le OUI de René Lévesque. Les adversaires étaient le pile et le face d'une même pièce.

Sa haine du nationalisme était enracinée au Québec, pas au Canada. Cela explique sans doute sa hargne tenace, voire son mépris, pour les fédéralistes nationalistes du Québec, les Claude Ryan, les Robert Bourassa et leurs semblables. Il avait réussi à diaboliser les «séparatistes» dans une forte frange du Canada anglais, au point de n'avoir aucune réticence à utiliser contre eux l'arsenal militaire, mais il lui était impossible d'agir ainsi avec les «autonomistes», qu'il détestait autant. Du haut de son trône, il s'est contenté de traiter Robert Bourassa de «mangeur de hot dogs» mais s'il avait pu...

C'était pour lui un combat très personnel. En octobre 1970, Pierre Elliott Trudeau déclarait agir au nom du gouvernement canadien qu'il dirigeait, mais quiconque le regardait dans les yeux savait que ses paroles venaient bien plus des tripes que de la tête... C'était à se demander, pendant cette crise, qui était le véritable premier ministre du Québec, Trudeau ou Bourassa...

Et quiconque aurait des doutes sur les motivations de ses interventions n'a qu'à regarder la vidéo de sa célèbre entrevue avec Tim Ralfe, de CBC (bit.ly/38aCEPt). Celle de son «Just watch me!» Le mot-clé ici, c'est «me». Ce n'est pas le gouvernement, le Parlement, le premier ministre qui fonce. C'est lui. Quand il abordait ces questions, son regard autoritaire et glacé intimidait tout le monde, y compris les journalistes de la presse parlementaire. Le ton et l'émotion n'y étaient pas, ou moins, quand il traitait de dossiers n'ayant rien à voir avec le statut du Québec au sein de la fédération.

Trudeau père avait une plus grande ouverture et une volonté de conciliation avec les nations autochtones du Canada. Il aurait sans doute fait preuve de plus de souplesse pour régler une crise majeure avec ceux qu'il ne voyait pas intrinsèquement comme des ennemis, même s'il avait fait face à des incidents violents et à des enlèvements politiques. Sans doute aurait-il été plus énergique dans la recherche de solutions que son fils Justin, mais j'ai peine à croire qu'il aurait pu dépoussiérer la Loi sur les mesures de guerre et mobiliser l'armée pour envahir les réserves.

C'est du moins ce que je pense, en me remémorant cette époque et cette crise d'octobre que j'ai couverte du début à la fin comme courriériste parlementaire à Ottawa.



1 commentaire:

  1. RÉPET est comme son père PET !!!
    Celui-ci conclu que l’hostilité de Trudeau contre la nation Québécoise s'expliquerait par son conflit œdipien et des identifications familiales.
    "Le vrai visage de Pierre Elliot Trudeau"

    Par François-Xavier Simard

    https://www.amazon.fr/Vrai-Visage-Pierre-Elliott-Trudeau/dp/2895492174?fbclid=IwAR0g4JnuLShdXgJSRQvyxzCjIEZmwLW2-c-XtbkaelsZHoKjiwu5cQC7LUQ

    http://lesintouchables.com/livre-576-Le-vrai-visage-de-Pierre-Elliott-Trudeau.php

    Voir l'essai à la fois psychanalytique, anthropologique et politique au sujet de ce dernier: "Le vrai visage de Pierre Elliot Trudeau" par François-Xavier Simard, éd. Les Intouchables, 2006. ISBN : 2-89549-217-4.

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