dimanche 15 mars 2020

Épicerie sur fond de pandémie...


Quand j'étais enfant, dans les années 1950, pour nous convaincre des bienfaits de la société d'abondance dans laquelle nous vivions, on nous montrait parfois dans les journaux et à la télé des images provenant de pays «communistes» où de pauvres gens faisaient la file dans des épiceries aux étagères quasi vides...

Ces souvenirs ont ressurgi vendredi dernier, vers 13 heures, quand je suis allé à mon supermarché IGA du quartier, petite liste d'épicerie en main, faire le plein pour un repas dominical (qui n'a finalement jamais eu lieu) avec les enfants et petits-enfants...

D'abord, fait très inusité pour un jour de semaine, le stationnement était bondé et j'ai dû circuler en voiture dans les allées à quelques reprises pour attendre qu'un client libère un espace... Secundo, en entrant, tant à ma gauche qu'à ma droite, il n'y avait aucun panier d'épicerie disponible alors qu'habituellement, on en trouve près d'une centaine...

J'aurais dû me douter de ce qui m'attendait à l'intérieur...

Après une pause aux fruits et légumes, où quelques clients magasinaient sans hâte devant des présentoirs bien garnis, je me suis déplacé vers la boucherie pour voir les choix de boeuf haché... Barbecue en vue.. Mais voilà, surprise, les étagères sont vides... Pas de boeuf haché mi-maigre, maigre ou extra-maigre... rien...

Et près des portes de la boucheries, six ou sept clients avec leurs paniers attendent... Je leur demande ce qu'ils font là... Ils veulent du boeuf haché bien sûr et les bouchers s'affairent à le préparer à l'intérieur... Personne n'a un numéro pour établir une priorité mais il est clair que je ne passerai pas devant la file impatiente...

Effectivement, un des bouchers sort avec une douzaine de contenants familiaux de viande hachée et l'attroupement le gobe en une trentaine de secondes... Je devrai attendre la prochaine cohue... J'en profite pour ouvrir la porte et demander s'il est possible d'obtenir du boeuf haché maigre... Oui, me répond-on... «Patientez, on n'arrête pas depuis 6 h 30 ce matin», lance une voix exaspérée...

Après une dizaine de minutes d'attente, l'employé me remet mon boeuf haché... Il y en a trop mais je peux le congeler, et je file rapidement vers d'autres allées du supermarché pendant qu'une nouvel attroupement d'amateurs de boeuf se précipitent sur les dernières offrandes de la boucherie...

Voilà l'allée du pain, que je fréquente moins qu'auparavant parce que Sobey's, la chaîne propriétaitaire de la bannière IGA au Québec, a décidé d'éliminer de ses étagères la marque Gadouas, notre pain préféré que je dois maintenant acheter au Metro... Mais aujourd'hui j'ai besoin de pains hamburger...

À ma grande surprise, les étagères sont vides... Pas de pain blanc, pas de pain brun... Il reste quelques pains Weight Watchers et certaines marques spécialisées moins vendeuses et, heureusement, un petit amoncellement de pains hamburgers de la marque maison, Compliments... Je n'en voulais pas douze, et pas cette marque, mais enfin... c'est mieux que rien... et il n'en restera plus dans quelques minutes...

La liste préparée par mon épouse indiquait aussi quelques boîtes de rotinis, de macaronis et de linguinis... L'allée des pâtes avait l'air d'une zone sinistrée, comme si une horde d'affamés avait presque tout raflé... Aucun doute, la panique créée par la COVID-19 a aiguisé l'appétit des amateurs de spaghettis et autres pâtes alimentaires...

Inutile d'ajouter que les compléments aux pâtes dont j'avais besoin - jus de tomate, sauce tomate, tomates étuvées, etc. - s'envolaient comme le papier de toilette... Rendu là, on n'hésite plus, on fait comme tout le monde... On se précipite sur ce qui reste pour le prendre avant que les vautours qui suivent s'en régalent...

Ma conjointe étant friande de soupes, j'avais aussi besoin de bouillons de poulet et de légumes, et quelques boîtes de crème de céleri et de crème de poulet. Encore une fois, des tablettes vides... À genoux dans l'allée, je réussis à trouver quelques contenants de bouillon au fond de l'étagère du bas... Pour la crème de poulet et de céleri, pas de chance... tout avait disparu...

Croyant avoir vu le pire, je me suis dirigé vers les légumes en conserve. Juste quelques boîtes de pois et carottes... Là encore, des tablettes complètement dégarnies... Il ne restait qu'une poignée de pois et carottes en conserve de marques plus exotiques qu'on n'achète pas parce que trop chères... Hop, les boîtes qui restent dans le panier (les légumes étaient délicieux soit dit en passant)...

J'ai fait l'allée des croustilles et autres friandises sucrées, huileuses et salées que je n'ai pas le droit de manger parce que je dois perdre du poids... Il y avait là un type qui venait d'empiler une douzaine de méga-sacs de croustilles dans son panier d'épicerie... Je l'enviais et me demandais en même temps pourquoi il voulait faire une provision d'un an de telles gâteries... Un autre moment étrange dans cette expérience proprement hallucinante...

Le dernier obstacle franchi (les longues files devant les caisses), je me suis dirigé vers le Metro de mon coin de Gatineau pour tenter de compléter ma liste d'épicerie, là aussi dans une ambiance de foire...

Je tiens à noter l'expérience par écrit parce qu'en 73 ans d'existence je n'ai jamais vu rien de tel... Ma mère de 95 ans non plus... Un jour, les petits-enfants et arrière-petits-enfants pourront lire les archives de leurs grands-parents et apprendre un peu ce que nous avons vécu durant la pandémie de 2020...







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