lundi 6 juillet 2020

Racisme systémique? Ras-le-bol...

J'en ai ras-le-bol d'entendre les gens galvauder l'expression «racisme systémique». On en étire le sens. Pire, on le déforme, on le fausse. Au point où l'on voit le «racisme systémique» partout... Si l'expression doit avoir un véritable sens, il en est de même pour les deux mots qui la composent.

Le racisme, ce n'est pas la xénophobie ou la discrimination même s'il peut les englober. Le racisme, c'est la conviction et l'expression d'un sentiment de supériorité d'une race, d'un groupe ethnique ou d'une culture par rapport à une (ou plusieurs) autre race, groupe ethnique ou culture. Le mot clé est supériorité. Le raciste est convaincu de la sienne, et de l'infériorité des autres.

Le qualificatif systémique fait référence au système, au régime, aux institutions, aux lois qui donnent au racisme une légitimité reconnue par l'État et ses émanations. Ainsi, l'esclavage légalisé des Afro-Américains aux États-Unis jusqu'à la guerre civile. Les régimes d'apartheid en Afrique du Sud (et dans les États du Sud américain jusqu'aux années 1960). Les lois et règlements canadiens visant à réprimer, voire supprimer la langue et la culture françaises. Le régime imposé aux Autochtones partout au pays.

Quand les États du Sud des États-Unis déployaient une armée de policiers pour empêcher des Noirs, par la force, de fréquenter des établissements réservés aux Blancs, c'était une manifestation de racisme systémique.

Quand le gouvernement canadien envoyait la GRC arracher des enfants autochtones à leurs parents pour les attrouper dans des pensionnats indiens, c'était une manifestation de racisme systémique.

Quand les provinces à majorité anglaise, au nom de la supériorité de la civilisation anglo-saxonne, adoptaient des lois répressives contre leurs minorités francophones pour les angliciser, c'était aussi une forme de racisme systémique.

Dans tous ces cas, le racisme émane du «système». Les individus qui l'appliquent peuvent être ou ne pas être racistes. Tous «exécutent les ordres» cependant. L'immoralité de telles actions a été établie aux procès de Nuremberg mais la nature du racisme systémique tend à déculpabiliser les individus et à jeter la responsabilité sur l'ensemble de l'appareil étatique ou bureaucratique.

C'est le côté le plus pernicieux du racisme systémique. En reconnaissant son existence, on blâme l'État, un ministère, une entreprise, une nation entière, mais pas les individus qui la forment, ces derniers devenant en quelque sorte victimes du système au même titre que les véritables victimes du racisme. En avouant un «péché» collectif, on se trouve à innocenter les individus coupables.

L'accusation récente du chef néo-démocrate Jagmeet Singh contre le député bloquiste Alain Therrien en fait une démonstration éclatante. M. Singh postule dans sa motion l'existence d'un racisme systémique (sans définir racisme, sans définir systémique) à la GRC et affirme que tous ceux qui s'opposent à la motion sont des racistes.

Ainsi, selon le chef du NPD, c'est de l'institution même, de la GRC, qu'émane le racisme. Le coupable, c'est le système, pas les membres de la Gendarmerie royale. Que des policiers soient racistes ne fait aucun doute. Que d'autres ne le soient pas ne fait aussi aucun doute. Mais la motion de M. Singh fait de ces derniers des complices d'un système jugé raciste dans lequel ils ou elles oeuvrent. Pire, il condamne comme racistes tous ceux et celles, fussent-ils militants anti-racistes, qui voudraient remettre en question ses définitions ou y apporter des nuances...

Historiquement, au Canada, le racisme systémique s'est surtout exercé contre les Autochtones et les Canadiens français. La mainmise de la culture états-unienne sur le Canada anglais influence à l'excès la perception des rapports entre Canadiens blancs et noirs. Que ces derniers soient victimes de racisme, de discrimination et d'injustices diverses apparaît évident, mais les défis que ces situations posent ne sont pas d'ordre systémique comme chez nos voisins du Sud.

La reconnaissance d'un racisme systémique par tout ce qui bouge, en commençant par Justin Trudeau, ne sert qu'à donner bonne conscience à ceux et celles qui se confessent sur la place publique, sans apporter de solution réelle aux situations créées par la présence d'individus racistes, y compris dans des postes de commande, un peu partout. Et que dire du rôle des médias, qui continuent de colporter des amalgames simplistes, brouillant ainsi les enjeux dans l'opinion publique. Leur crédibilité dans les dossiers de racisme dit systémique est maintenant quasi nulle.

Le rapprochement entre laïcité et racisme systémique au Québec dans les médias anglo-canadiens recèle hypocrisie et malhonnêteté, et suinte de relents du vieux fond de racisme anti-francophone à travers le pays. La Loi 21 porte sur la laïcité de l'État québécois et n'a rien à voir avec race, ethnie ou culture. Elle interdit les symboles religieux (de toutes les religions) pour certaines catégories d'employés du secteur public. Les plaintes larmoyantes en faveur des femmes musulmanes voilées, comme si la loi ne visait qu'elles, sont particulièrement indigestes. En les obligeant à retirer leur voile dans certaines fonctions, la Loi 21 les met sur un pied d'égalité avec toutes les autres femmes et tous les hommes dans la même situation, alors que le voile imposé par leur religion leur conférait un statut d'infériorité.

Les Anglo-Canadiens, héritiers d'une culture impériale britannique éminemment raciste, ont beaucoup de difficulté à comprendre le racisme. Les Noirs, les Autochtones et les francophones d'ici (Québécois, Acadiens et Canadiens français) ont été historiquement victimes de formes de racisme, y compris de racisme systémique. Leurs combats pour assurer la pérennité de leur culture et de leurs institutions ne peuvent d'aucune façon être associés au racisme.

Aux États-Unis, les Afro-Américains qui manifestent contre la violence policière ne sont pas des racistes anti-blancs. Ils se défendent. Cela relève même de la plus légitime défense. Comme les combats des Autochtones et des collectivités francophones au Canada. La victime qui combat le racisme ne peut, par définition, être raciste.

Le temps est venu de clarifier les enjeux et les concepts liés au racisme. Cela est essentiel si on veut vraiment régler les problèmes. Mais je n'attends plus grand chose des dirigeants politiques, ni des médias qui ont, dans ce dossier, abandonné les principes journalistiques d'enquête en faveur de conclusions jugées faussement évidentes... 



2 commentaires:

  1. Mon humble vision de cet acharnement à vouloir alimenter ce chaos chez nous au Québec. Volontairement orchestré par des personnes, ayant soif de pouvoir que ce soit politique, religieuse et journalistique, sur le racisme et par surcroît systémique ayant parfaitement l’instruction et la connaissance, indique clairement une mauvaise foi.

    Les vraies divergences se situent entre :

    Nationalisme et identité vs fédéralisme et multiculturalisme;

    Politique et laïcité vs pouvoir politique que veulent conserver les religions sur le politique;

    Pouvoir individuel vs pouvoir collectif.

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