vendredi 20 août 2021

Gatineau... Des soins de santé, SVP!

Je ne sais pas si ce que je vis présentement constitue la norme en soins de santé en Outaouais, mais si ce l'est, les choses vont mal... très mal...

Jour 1 - un lundi d'août 2021

Depuis quelques jours, j'ai un bleu impressionnant entre l'épaule et le coude gauches, sans doute une séquelle d'une déchirure musculaire inopérable subie en octobre 2019 et pour laquelle je suis toujours suivi en orthopédie. L'hémorragie interne est sans doute aggravée par les anticoagulants que je dois consommer quotidiennement.

Lundi matin, je me rends à la clinique de mon orthopédiste (inutile d'essayer de le joindre à l'hôpital, c'est comme tomber dans un trou noir), que j'ai vu pour la dernière fois au mois de mai et qui me conseille régulièrement de signaler toute nouvelle anomalie. À l'accueil, j'apprends que le médecin spécialiste ne pourra me voir avant septembre et qu'entre-temps, on m'inscrira sur une liste d'attente...

L'impression qui m'est laissée, c'est qu'un hématome, même imposant, n'énerve pas les habitués plus qu'il le faut. Une fracture attirerait davantage l'attention...

Jour 2 - un mardi d'août 2021

Après souper, je note l'apparition d'un nouveau foyer de saignement interne, plus inquiétant. Suffisamment inquiétant, en tout cas,  pour me rendre cette fois à l'urgence de l'hôpital de Hull. Je serais allé à l'hôpital de Gatineau, tout proche, mais l'urgence ferme à 20 h (!!!) et je quitte la maison à 19 h 30...  

En arrivant à l'urgence, je prends un numéro, bien sûr, et quinze minutes plus tard, me voilà au triage. Encore une fois, j'ai l'impression qu'on ne bousculera personne pour ce genre de blessure. Dès que j'ai dit qu'il n'y avait pas de fracture, j'ai senti une nette baisse d'intérêt. Quoiqu'il en soit, une fois passé à l'enregistrement, on me dirige vers la salle d'attente où, me semble-t-il, seulement une dizaine de «clients» patientent...

Je commence à me rendre compte de ce qui m'attend vers 21 h (je suis là depuis 19 h 50) quand aucun des dix «patients» autour de moi n'a été appelé aux soins. La soirée avance, les convocations au traitement sont rares (2 ou 3). Des fractures. Ça presse plus. Des coupures, des hémorragies jugées non menaçantes, n'ont pas de très hautes cotes de priorité. Vers minuit, on nous appelle de nouveau au triage. En partie pour voir s'il y a changement, ou pour rayer de la liste ceux et celles qui se sont découragés et qui ont quitté l'hôpital... Je commence à comprendre que je resterai sans doute jusqu'au matin avec mon épouse sur nos chaises devenus inconfortables au fil des heures...

Après quatre ou cinq heures d'attente, les visages autour de moi sont toujours les mêmes. Les gens jasent, vont chercher des couvertures pour se réchauffer, n'osant pas trop fermer l'oeil au cas où (sait-on jamais) leur nom soit enfin appelé. C'est frustrant. La salle est isolée, sans horloge, sans que l'on puisse voir un seul membre du personnel (à l'exception d'un gardien de sécurité), sans savoir combien de gens occupent les salles de traitement. Seul un écran de télé passe en boucle quelques messages qu'on se lasse d'entendre après la vingtième fois...

Un peu après minuit, deux ambulances déposent dans la salle d'attente deux personnes qui semblent, pour dire le moins, désorientées. Les deux hommes entrent et sortent sans motif apparent. Que font-ils à l'urgence, laissés là par des paramédics qui avaient sans doute suivi les consignes et qui semblaient un peu intimidés (comme le gardien de sécurité)? Finalement, vers 2 heures du matin, découragés, perturbés par le comportement incertain des deux individus, nous abandonnons et retournons faire dodo à la maison...

J'aurai au moins eu la réponse à une question. Ce que je croyais urgent (et que je crois toujours urgent) ne l'était pas aux yeux des responsables de l'urgence de l'hôpital de Hull. Quand je suis sorti du lit vers 8 heures du matin, je me suis demandé si la petite communauté qui s'était formée pendant les six heures que j'ai passées à l'urgence attendait toujours patiemment, enroulée dans des couvertures de flanelle, oreilles tendues vers des haut-parleurs silencieux...

Jour 3 - un mercredi d'août 2021

Retour aux sources... mon médecin de famille. J'appelle à sa clinique, me souvenant que le mercredi, on y acceptait des sans rendez-vous. Je compose le numéro à l'ouverture, à 8 heures, mais le message m'informe que les appels téléphoniques ne sont acheminés qu'à compter de 9 heures. Nouvelle communication à 9 heures, avec les résultats escomptés. La ligne est occupée, et il faut faire des recompositions en rafale pour espérer percer entre deux appels...

Finalement, je réussis à joindre la réception où l'on m'apprend qu'on a mis fin aux sans rendez-vous et que mon médecin de famille ne peut me voir avant le mois de septembre... Décidément ça va mal...

On me dirige vers la clinique coopérative de la Basse-Lièvre, dans le secteur Buckingham, qui se spécialise en sans rendez-vous. À 9 h 30, je réussis à entrer en communication avec la clinique et oh joie! j'ai un rendez-vous avec un médecin le même après-midi, vers 14 h 45.

Enfin je vois un médecin qui mettra en branle les rouages d'un véritable diagnostic. Après un examen assez exhaustif (mon bras était encore douloureux le lendemain) de l'épaule et du biceps, il me rassure - les saignements semblent avoir cessé -, me recommande d'interrompre mes anticoagulants pour quelques jours et prescrit une échographie de surface de l'épaule et du bras gauche à une clinique de radiologie de Gatineau.

Voilà, me dis-je, le pire est fait. Arrivé à la maison, je téléphone à la clinique de radiologie pour apprendre, dans le message enregistré, qu'on n'y prend aucun appel téléphonique... Il faut expédier un courriel ou un fax explicatifs... Pas rassurant... J'envoie un courriel avec une copie scannée de la requête en attachement... Quinze minutes plus tard, je reçois la réponse: nous ne faisons pas d'échographie de surface ici...

Nouveau courriel... Je réponds: mais votre propre formulaire indique, parmi les choix, une échographie de surface... La clinique m'expédie un second courriel, avec une nuance... Pas d'échographie de surface du biceps, et on avertira votre médecin... Merde! Et moi qui pensait que tout allait mieux...

Je rappelle la clinique coopérative pour les informer de ce nouvel obstacle. On semble surpris. Le médecin en sera avisé et enverra une nouvelle requête... probablement à l'hôpital de Buckingham (secteur est de Gatineau).

Jour 4 - un jeudi d'août 2021

Au milieu de l'après-midi, toujours sans nouvelles, je donne un coup de fil à la clinique coop pour m'informer de l'état des choses. On me rappelle peu après pour me dire que le médecin a reçu mon message de la veille et qu'il a rempli une nouvelle requête, envoyée cette fois à l'hôpital de Buckingham.

Combien de temps devrai-je attendre? Un jour, une semaine, plus d'une semaine? C'est habituellement rapide, m'assure-t-on. 

Peu après, je reçois un appel de la clinique de l'orthopédiste (mon premier arrêt du lundi) qui m'informe que le spécialiste pourrait peut-être me voir le 26 août... On me rappellera dès qu'on le saura...

Jour 5 - un vendredi d'août 2021

En après-midi, toujours pas reçu de convocation de l'hôpital... Je cours le risque d'appeler directement au centre hospitalier (ce qui serait impensable aux hôpitaux de Hull et Gatineau), et je réussis à joindre le service de radiologie de l'hôpital de Buckingham. Mon dossier n'y est pas, apparemment. Après vérification, on m'informe que la requête est bel et bien là, mais qu'elle n'est pas marquée urgente, et que mon attente sera d'au moins de deux à trois mois!!!

Nouvel appel à la clinique coopérative pour tenter d'obtenir une cote de priorité plus élevée et un rendez-vous d'échographie vite, très vite, au moment où ça peut faire une différence dans le diagnostic et le pronostic. Ça n'augure pas bien... Si les limbes existent, elles doivent ressembler à la situation dans laquelle je me trouve... 

Je songe à ma semaine de démarches (qui semblent loin d'être terminées) et me dis que dans la quatrième ville du Québec, les choses ne devraient pas se passer ainsi... Des médecins qu'on ne réussit pas à voir, des urgences parfois fermées, et où, même quand elles sont ouvertes, on attend beaucoup trop longtemps pour des services publics qu'on paie cher avec nos impôts, des salles d'attente froides, inconfortables et peu accueillantes où les patients sont à l'écart du personnel de l'hôpital...

Si j'étais ministre de la Santé, j'obligerais tous les cadres supérieurs des hôpitaux à passer une soirée et une nuit dans leur urgence... et de parler à chaque patient qui y poireaute depuis deux, quatre, huit, douze heures et plus... Les bobos des hôpitaux et de tous les services de santé recevraient peut-être l'attention qu'ils méritent...

Je continue d'espérer un déblocage... mais je suis de moins en moins optimiste... Et mon bras bleuissant fait mal... Je risque de finir de nouveau, d'ici quelques jours, sous une couverture de flanelle à l'urgence de Hull... pour le temps qu'il faudra... J'apporterai un manteau d'automne, quelques livres, des barres granola, un café, quelques bouteilles d'eau et toute ma patience (la meilleure qualité d'un «patient» à l'hôpital)...

SOS...


1 commentaire:

  1. C'est tout de même incroyable d'avoir si peu de service, étant donné l'ampleur de nos impôts qui sont affectés aux services de santé. Quand je pense que la première préoccupation de l'ex-ministre Barrette était de rehausser le salaire des médecins spécialistes, déjà très bien payés...

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