S'il y a une chose que j'ai comprise en grandissant comme Franco-Ontarien dans la capitale canadienne, c'est qu'une minorité n'a aucun pouvoir. Elle est condamnée à lutter et à quémander. Aujourd'hui. Demain. Toujours. En démocratie, la majorité a le droit de décider. Aujourd'hui. Demain. Toujours.
Je suis maintenant Québécois. Depuis plus de 45 ans. Et j'ai peine à croire que les francophones du Québec ont toujours de la difficulté à comprendre cette vérité. Nous formons une minorité au Canada. Les députés que nous envoyons à Ottawa n'exerceront jamais le pouvoir à moins de s'aligner sur les intérêts de la majorité Canadian...
Que le pouvoir soit libéral, conservateur, voire néo-démocrate n'y changera rien. Les députés québécois y seront minoritaires. Ils seront condamnés à lutter et quémander, à accepter ou rejeter les miettes de la table anglo-canadienne. Et on voudrait que l'électorat francophone du Québec continue de pratiquer l'art du vote stratégique, qui consiste à miser sur les moins pires? C'est un exercice stérile!
Entendre des nationalistes ou des indépendantistes discuter de l'utilité ou de la pertinence de voter pour le Bloc québécois me hérisse... Y'en a-t-il encore qui croient vraiment à l'efficacité des coalitions ponctuelles ou à un «beau risque» version 2021? Que débarquer Trudeau et sa bande en favorisant l'élection d'O'Toole et sa bande va changer quelque chose de fondamental?
Ultimement, le sort du Québec se jouera à Québec. Mais en attendant cette souveraineté qui ne semble pas imminente, pour dire le moins, Ottawa détient de réels pouvoirs et dépense notre argent... jusque dans nos champs de compétence. Et les Trudeau, Chrétien, Harper et autres fonderont toujours leur légitimité sur le fait que les bons Québécois élisent des députés au sein de leurs formations. Et ils auront raison!
Voilà pourquoi le Bloc québécois demeure si essentiel. Quand on accepte de reconnaître qu'en vertu des règles de la démocratie, la majorité anglophone du Canada peut - quand elle le veut - gouverner son pays sans tenir compte de nos exigences, tout devient clair.
Le choix qui nous est alors laissé, c'est de placer à Ottawa des pions, la plupart silencieux, soumis à la discipline de partis fédéralistes à caractère anglo-dominant, ou d'élire des indépendantistes qui participeront aux débats parlementaires sans illusion, dignement, honnêtement, en faisant valoir des positions qui seraient celles de la nation québécoise si elle était en mesure de décider seule.
Le Bloc québécois ne va pas à Ottawa pour y prêcher l'indépendance du Québec. Les députés du Bloc siègent au Parlement fédéral pour faire entendre le Québec, pour le défendre, pour y exprimer - en français - ses espoirs, ses valeurs, ses positions, ses préoccupations. Ils sont là aussi pour promouvoir les intérêts de la francophonie, qui en a bien besoin dans ce pays où le français a toujours été malmené.
Le 20 septembre, pensons-y.
En 2011, alors que j'étais toujours éditorialiste au quotidien Le Droit, j'avais écrit ce texte sur mon blogue, écho de mon éditorial dans Le Droit du 18 avril 2011 (bit.ly/3kEUnqc) qui proposait des arguments similaires. Dix ans plus tard, il conserve son actualité.
Le choix, pour les Québécois, «c'est d'élire des députés fédéralistes obligés de composer avec une majorité anglo-canadienne ou élire des députés du Bloc qui seraient libres de nous défendre, individuellement et collectivement, et de faire la promotion de points de vue qui émanent de notre collectivité. Nous sommes différents et avons pleinement le droit d’exprimer cette différence au Parlement canadien. Si cela peut sembler irritant et un peu dysfonctionnel, tant pis. Nous concédons aux autres le pouvoir auquel ils auraient droit de toute façon, étant majoritaires, et nous contentons pour l’instant de participer avec honneur et dignité à un régime qui finira par se transformer… ou que nous quitterons.»
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Entièrement d'accord avec vous, M. Allard. Le Bloc défend nos intérêts à Otttawa et peu importe qu'il y prenne le pouvoir un jour (cela n'arrivera évidemment pas). L'important, c'est qu'il s'exprime et soit entendu. Il ne faut pas baisser les bras...
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