Depuis le début de l'année 2023, Justin Trudeau a:
- annoncé son intention d'attaquer, avec l'aide de ses juges de la Cour suprême, le pouvoir de dérogation utilisé par Québec dans ses lois sur la laïcité et le français langue commune (Lois 21 et 96);
- nommé une intégriste religieuse anti-québécoise comme porte-parole de son offensive contre ce qu'il appelle faussement l'islamophobie;
- convoqué les ministres provinciaux de la Santé comme si la santé était de compétence fédérale et qu'il était leur patron, avec l'intention très claire d'utiliser son pouvoir illimité de dépenser pour imposer ses priorités au Québec et aux autres.
Vous pensez que c'est un hasard? Une coïncidence? NON! Le fils et héritier de PET est convaincu d'avoir gagné, d'avoir désormais les coudées franches et de pouvoir mettre le Québec à genoux (avec la complicité des provinces à majorité anglaise comme en 1982).
Forts d'une constitution adoptée contre la volonté des Québécois, d'une Cour suprême choisie par Ottawa et armée du pouvoir de désaveu des lois provinciales (et donc de celles du Québec), Justin Trudeau et sa bande de centralisateurs ont réussi à mettre le dernier clou dans le cercueil de la fédération canadienne le 25 mars 2021. Ils ont dorénavant TOUS les atouts juridiques et constitutionnels, et peuvent foncer sans réserve.
Que s'est-il passé ce 25 mars, il y a près de deux ans? La Cour suprême a asséné un coup de masse au principe fédéral qui régissait le Canada depuis 1867 en accordant au gouvernement central un statut supérieur à celui des provinces. Les juges ont décidé qu'Ottawa pouvait, quand il estime que l'intérêt «national» est menacé par l'inaction ou l'action d'une ou de plusieurs provinces, légiférer dans des compétences provinciales.
Et ce n'est pas là une mesure temporaire. «L'effet de la reconnaissance d'une matière en vertu de la théorie de l'intérêt national est permanent et confère compétence exclusive au Parlement (fédéral) en cette matière», écrivaient les juges majoritaires dans leur décision (voir bit.ly/3w5vd9e). Et qui décide si un enjeu devient tout à coup d'intérêt «national»? Poser la question c'est y répondre: Ottawa et ses juges...
Une chose est sûre. Quand on utilise le mot «national» à Ottawa, ou même à la Cour suprême, il n'a pas le même sens ou la même portée qu'à Québec. Alors si un bon jour, les normes de soins en CHSLD sont jugées «d'intérêt national» par la bande à Trudeau, ou encore la laïcité de l'État, ou les droits linguistiques, le gouvernement fédéral a reçu la clef d'une nouvelle porte pour envahir les champs des provinces.
Et tout incite à croire qu'il a décidé de s'en servir. La nomination de Mme Elghawaby comme représentante en matière d'islamophobie est clairement une provocation. Comme la déclaration de guerre à la Loi 21 et à la Loi 96. Comme le match d'intimidation pour le financement de la santé. Trudeau semble vouloir l'affrontement, particulièrement avec le Québec, et doit déjà scruter le calendrier en vue d'élections fédérales précipitées. Il l'a fait en 2021. Il peut bien recommencer.
Les provinces anglaises sont déjà prêtes à céder face à Ottawa, qu'elles considèrent comme leur gouvernement «national». Le Québec sera seul, sans bouclier juridique ou constitutionnel, en position d'extrême faiblesse depuis que les gouvernements Charest, Couillard et Legault ont enterré la seule menace efficace, celle de l'indépendance. Les stratèges d'Ottawa savourent déjà l'humiliation que subira Québec.
Si le gouvernement de la CAQ n'a pas compris ce que trament les longs couteaux d'Ottawa, le réveil sera dur... parce qu'un bon matin, pas trop lointain, c'en sera fini du projet de Québec français et laïc, et les priorités québécoises en santé devront être soumises à l'approbation du gouvernement fédéral. Ce qui suivra sera bien plus laid...
Vous n'avez pas lu ça ailleurs dans nos médias? Non, moi non plus...