mercredi 25 septembre 2019

Les Verts, vaincus sans combattre...


Au tout début de cette campagne électorale, si j'avais été parieur et si, bien sûr, j'avais beaucoup d'argent (ce qui n'est pas le cas), j'aurais misé une somme considérable sur une percée majeure du Parti Vert au Canada anglais. Quarante, cinquante, pourquoi pas jusqu'à 70 ou 80 députés pour les Verts! C'était LEUR année!

Mais Elizabeth May est en train de tout gâcher...

Avec les débats urgents sur les pipelines et les sables bitumineux, l'aggravation de changements climatiques qui préoccupent maintenant l'ensemble de l'électorat, la déforestation en Amazonie et en Afrique qui menace la planète entière, et une assiette d'enjeux environnementaux qui déborde constamment, l'ensemble du Canada était mûr pour un changement de garde.

Au Québec, l'élection fédérale porte toujours une dynamique différente de celle des autres provinces, et le Bloc Québécois - en plus de plaire à l'Électorat autonomiste et indépendantiste - semble «plus vert que les Verts» (ces derniers y mènent d'ailleurs une campagne médiocre). Le parti dirigé par Elizabeth May y passera difficilement le seuil de la marginalité.

Ailleurs au Canada, cependant, les signes d'une éclosion s'accumulaient. Un deuxième député au Parlement canadien dans une partielle en 2019, des députés élus dans quatre législatures provinciales (8 à l'I.P.-É. où les Verts forment l'opposition officielle, 3 au N.-B., 1 en Ont., 1 en C.-B.), et un vote populaire en hausse. Les portes de l'antichambre du pouvoir semblaient s'entrebâiller...

Or, dès le début de la campagne il y a quelques semaines, Mme May a dit rêver d'un Parlement minoritaire où elle détiendrait la balance du pouvoir. Quelle idiotie! L'objectif premier d'un parti politique est de prendre le pouvoir, de diriger le gouvernement. Le Parti Vert s'avouait vaincu sans même avoir combattu... C'était s'aliéner au départ tous les électeurs qui préfèrent voter gagnant...

Il fallait montrer une ferme volonté de gouverner, brandir à l'électorat la possibilité, la nécessité, l'urgence d'un gouvernement vert... et non la perspective d'une dizaine ou d'une quinzaine de députés négociant leur appui à un parti libéral ou conservateur minoritaire qu'ils avaient combattu les semaines précédentes.

Une des clés du succès électoral, c'est la capacité des flairer le vent... les occasions aussi... Brian Mulroney avait touché la cible face à John Turner lors des débats de 1984... Jack Layton avait su profiter au max d'une présence à «Tout le monde en parle» pour déclencher une vague orange au Québec... Devant une planète en perdition, Mme May avait un fruit mûr à cueillir...

Et voilà que tout déraille... Cafouillage sur la dénonciation des sables bitumineux de l'Alberta, qu'un premier ministre bien moins vert, François Legault, avait traité de «pétrole sale»... Pancartes anglaises au Québec... Confusion autour de la présence d'un candidat québécois ouvertement indépendantiste, Pierre Nantel, que Mme May aurait dû expulser sans hésitation pour protéger ses assises au Canada anglais... Et que dire de cette image «photoshoppée» où un verre et une paille en plastique ont été dissimulés...

Peut-on espérer qu'il ne soit pas trop tard? Il reste les débats, où Mme May doit se présenter comme candidate au poste de première ministre, et non comme leader d'un parti marginal espérant détenir la balance du pouvoir. Le scénario idéal au lendemain du 21 octobre serait un gouvernement vert minoritaire avec le soutien conditionnel du Bloc québécois, un allié naturel des «greens» au Canada anglais. Elizabeth May doit faire tout son possible pour allumer l'étincelle qui donnera aux Verts l'élan, l'étincelle, la rafale qui crée un moment décisif...

On me dira que je rêve en couleur... Je suis habitué... Mais l'inattendu se produit à l'occasion... Avant les débats de 1984, John Turner avait une avance appréciable dans les sondages... Personne n'aurait prédit plus de 200 sièges aux conservateurs de Mulroney... Et qui aurait pu croire, au début de la campagne de 2011, que le NPD raflerait près d'une soixantaine de circonscriptions au Québec... En 2019, une partie importante de l'électorat abandonnerait les vieux partis si une «vague» verte avait la moindre chance de se pointer...

À Mme May de jouer...








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