J'ai encore une fois l'impression de commencer un autre texte plate que peu de gens liront et qui sombrera dans l'oubli avant même que l'encre (virtuelle) n'ait eu le temps de sécher (virtuellement)...
Enfin, c'est pas parce que c'est plate que c'est pas important...
Alors allons-y!
Tous les ans, le 20 mars, c'est la Journée internationale de la Francophonie. Une journée qu'on souligne ça et là, qu'on ne célèbre à peu près pas, qui laisse la plupart des francophones indifférents...
À la Fête nationale, à la St-Jean, où la langue et la culture françaises sont au coeur des célébrations, on voit un peu partout des spectacles, des drapeaux, des rassemblements, des défilés...
Le 24 juin ne passe jamais inaperçu.
Mais le 20 mars? Bof! On sort des boules à mites l'Organisation internationale de la Francophonie, dont la secrétaire-générale émane d'un pays qui a récemment troqué le français pour l'anglais...
On évite surtout de parler de la France, qui vient d'introduire la langue anglaise sur ses cartes d'identité officielles, qui prépare les Olympiques de 2024 avec un slogan unilingue anglais...
Et pourtant, dans nos tripes, quelque part, on sait qu'en parlant français tous les jours, en lisant des livres, magazines et journaux de langue française, qu'en écoutant la télé et la radio en français, on participe à cette francophonie.
Et qu'en cette époque où l'hégémonie de l'anglais menace de son rouleau compresseur la diversité linguistique sur tous les continents, il y a une certaine urgence...
En tout cas, nos journaux, ou ce qui en reste, semblent s'en douter. Mon ancien quotidien, Le Droit, publiait ce samedi 20 mars 2021 un cahier papier de 28 pages tabloïd à l'occasion de la Journée internationale de la Francophonie!
Ce n'était pas un cahier de la salle de rédaction. Il s'agissait plutôt d'un cahier publicitaire (on dit maintenant cahier promotionnel...), où typiquement une pub sera le plus souvent accompagnée d'un texte portant sur les activités ou produits et services de l'annonceur.
Cela ne signifie pas que le cahier soit moins intéressant pour le lecteur. Mais cela nous dit que ce sont les acheteurs d'espace publicitaire qui ont déterminé le choix des sujets abordés. Et ça nous donne une indication de la stratégie de sollicitation de la pub par la direction du quotidien.
Ce qui m'a le plus frappé, c'est l'absence totale de publicités (et donc de textes) en provenance de la rive québécoise de l'Outaouais, où résident près de trois quarts des abonnés du Droit. Le contenu du cahier de 28 pages était donc presque exclusivement franco-ontarien.
Le Droit a-t-il uniquement sollicité les annonceurs en Ontario français? Si oui, pourquoi? Les représentants publicitaires du journal ont-ils essuyé des refus systématiques à Gatineau et ailleurs en Outaouais? Le gouvernement québécois, qui s'est payé une demi-page dans le cahier du Devoir sur la Journée mondiale de la Francophonie, aurait sûrement assuré sa présence dans les pages du quotidien de l'Outaouais...
L'Université d'Ottawa, l'Université St-Paul et le collège La Cité, d'Ottawa, ont acheté des espaces publicitaires. Faut-il croire que l'Université du Québec en Outaouais et le Cégep de l'Outaouais auraient refusé de souligner leur apport à la francophonie?
Le gouvernement fédéral, dans sa pub, a inclus les photos de tous les députés de la grande région desservie par Le Droit, y compris les quatre députés libéraux de l'Outaouais québécois. Les députés libéraux provinciaux d'Ottawa et de l'Est ontarien occupent une demi-page. Mais où sont les députés de l'Outaouais à l'Assemblée nationale? Ont-ils même été sollicités?
La chaîne franco-ontarienne TFO publie une annonce pleine page. Télé-Québec n'en aurait pas fait autant? L'hôpital Montfort propose une pub mais les hôpitaux de Gatineau sont absents. Pourtant, l'université McGill vient d'y ouvrir une faculté satellite de médecine où la langue d'enseignement est le français...
On pourrait continuer ainsi longtemps... Clairement, les Franco-Ontariens, constamment en lutte depuis plus d'un siècle, sont plus sensibilisés aux initiatives médiatiques en faveur de la langue et de la culture françaises. Et tout aussi clairement, il semble y avoir perception que l'Outaouais ne s'y intéresse pas...
Il est vrai que sur la rive québécoise de l'Outaouais, peu de voix s'élèvent pour défendre la langue française contre les menaces qui pèsent lourdement sur elle, et qui grugent ses effectifs d'année en année. Seul le président d'Impératif français, Jean-Paul Perreault, est toujours prêt à monter au front. Sans lui, le silence serait assourdissant.
Pourtant, à plusieurs égards, la situation du français en Outaouais n'est pas sans rappeler celle des Franco-Ontariens... Dans la région du Pontiac, les francophones se font assimiler depuis plus d'un siècle et font toujours partie d'un diocèse catholique anglo-ontarien... À Gatineau, il a fallu se battre pour que les étudiants en médecine de McGill à Gatineau puissent suivre leurs cours en français... Le centre-ville de Gatineau s'anglicise à vue d'oeil et les violations flagrantes de la Loi 101 se multiplient...
La morale de cette histoire? Il est difficile de comprendre pourquoi la Journée mondiale de la Francophonie semble un sujet d'intérêt exclusivement franco-ontarien pour le quotidien Le Droit. Et peu importe de quelle façon on retourne la question, les réponses sont inquiétantes...
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