dimanche 27 février 2022

L'équilibre de la terreur...

«Que venez-vous faire camarade, que venez-vous faire ici...» Jean Ferrat, Camarade, 1969

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Si Jean Ferrat était toujours parmi nous, il salirait en poésie et en musique les bottes russes qui piétinent la plaine de l'Ukraine. Comme dans sa chanson Camarade, condamnation implacable des militaires soviétiques qui avaient envahi la Tchécoslovaquie en 1967.

Comme dans Maria, ce retour émouvant de Ferrat sur l'époque où la république espagnole croulait, sans appui des démocraties, sous la violence des militaires et puissances fascistes. «On vit l'Espagne rouge de sang, crier dans un monde immobile» (Maria, 1967)...

La vaillante résistance ukrainienne de 2022 sera sans doute, un jour, chantée par quelque barde. On versera des larmes en revoyant les images de combattants débordés et de braves civils qui se sont parfois dressés sans armes devant les chars d'assaut de Moscou.

Mais comme d'habitude, ce sera trop tard. Les petits peuples isolés se font presque invariablement piétiner par le géant sans scrupule. David qui vainc Goliath, Moïse qui terrasse le pharaon ne sont que de vieilles fables. Si Dieu existe il nous attend, bien tranquille, au ciel. Si l'éternel avait vraiment sauvé les Juifs des griffes de l'Égypte et des eaux de la Mer Rouge, il ne les aurait pas livré aux camps de la mort d'Hitler.

Les Ukrainiens ont besoin d'alliés puissants. De soldats. D'armes. Aujourd'hui. Dans deux semaines, deux mois, tout sera fini. Prières, messages sur Facebook et autres médias sociaux, protestations dans les rues, sanctions diplomatiques et économiques... cette colère de la planète n'aura pas vraiment d'effet immédiat.

Un humain seul peut vaincre la répression des grands s'il a toute une vie pour le faire. Au 20e siècle, Gandhi a fissuré l'empire britannique et Mandela, de sa prison, a abattu l'apartheid sud-africain. Mais quand l'issue se mesure en heures et en jours, un tollé mondial n'aboutira à rien s'il ne s'accompagne pas de troupes au sol et d'avions dans les airs.

Et c'est là le hic. Les démocraties ont les moyens de repousser les attaques russes, peu importe où. Facilement, même. Mais l'occupant du Kremlin a le doigt sur le bouton nucléaire et personne ne sait trop s'il est assez fou pour utiliser l'arme atomique. Alors on fait tout sauf engager le combat contre les armées russes.

Mais il y a un problème. Si Vladimir Poutine est vraiment aussi instable que certains le croient, tout prétexte peut le déclencher. Ce matin, il brandit la menace nucléaire en réplique aux déclarations qu'il juge belliqueuses de l'OTAN et aux multiples représailles économiques qu'il dit illégitimes... 

Les Russes ont plus de 6000 ogives nucléaires. Les Américains plus de 5500. Poutine peut, s'il le veut, anéantir la planète. À moins d'un coup d'État en Russie même, ce sera pour un temps l'équilibre de la terreur: d'un côté, l'anéantissement de l'Ukraine sous nos yeux; de l'autre, les «99 Luftballons» (bit.ly/3thc9nO) dans le ciel...

Mais le problème ne sera pas réglé. Poutine sera là jusqu'aux années 2030... Il peut toujours recommencer... Alors...


1 commentaire:

  1. La réalité a toujours plusieurs facettes. La réalité de ce conflit entre la Russie d'une part et les États-Unis et ses vassaux sur le dos des Ukrainiens. Beaucoup d'historiens et de diplomates américains à la retraite, des chroniqueurs réputés (américains, anglais, et autres), des militaires retraités encore une fois américains, ont exprimé leurs avertissements sur cet enjeu au cours du dernier quart de siècle. Dès 1997, l'historien George F. Kennan, avertissait que l'extension en l'OTAN vers l'est pourrait mener au conflit que nous subissons aujourd'hui. Pourtant, il y avait des solutions, comme le soulignait Jocelyn Coulon il y a quelques jours dans Le Devoir. Pierre Dubuc, dans L'Aut-journal, a argumenté que le Québec n'avait aucun intérêt à jouer dans ce conflit. L'ancien marine américain, Scott Ritter estime que ce conflit risque à nous mener à un conflit mondial. J'ai fait état de toutes ces interventions sur mon site FB depuis quelques semaines. Le diplomate à la retraite et chroniqueur indien (Inde), pose le conflit dans un tout autre niveau : https://www.indianpunchline.com/india-shouldnt-miss-world-war-pointer/. C'est à lire, mais il faut une forte dose de sang froid pour en retirer les conséquences.

    Au printemps 2014, je voyageais le long de la côte Atlantique. J'ai porté moins d'attention à l'actualité. Ce n'est que tout récemment que j'ai découvert des événements dont nos médias ont peu fait état. Ce document témoigne d'une réalité que je ne connaissais pas : https://www.youtube.com/watch?v=hyN3yWMFs8w. Il aurait été beaucoup mieux que l'Ukraine accepte un statut de neutralité, dans le cadre d'un traité de sécurité pour toute l'Europe, comme la Russie l'avait proposé. Si la Russie se sent menacée plus que présentement, on ne sera peut-être là pour le regretter. Il faut trouver une porte de sortie pacifique.

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