samedi 16 mars 2024

Immigration: l'opération suicide...

Capture d'écran de Radio-Canada

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Parfois, je ne comprends tout simplement pas... Prenez cette demande d'obtenir pour le Québec les «pleins pouvoirs» en immigration, formulée par François Legault en prévision de son sommet du 15 mars avec Justin Trudeau... Le premier ministre québécois a beau avoir raison de réclamer le contrôle de l'immigration - pour l'avenir du français, pour protéger notre identité, nos valeurs - il n'a pas la moindre chance de l'obtenir et il le sait. Alors pourquoi s'y aventurer?

Serait-ce pour fanfaronner publiquement devant Ottawa et tenter ainsi de récupérer les franges d'opinion publique qui glissent depuis des mois vers le Parti Québécois et son chef Paul St-Pierre Plamondon? Si c'est le cas, voilà une stratégie qui ne peut que lui éclater en pleine figure. Il fait face à un premier ministre fédéral ayant en poche tous les atouts constitutionnels et un soutien quasi indéfectible de ses juges des tribunaux supérieurs. L'article 95 de l'AANB affirme clairement la prédominance législative du fédéral en immigration, et depuis le jugement de la Cour suprême sur la taxe carbone en 2021, Ottawa n'a qu'à déclarer un enjeu «d'intérêt national» pour qu'il devienne une compétence exclusive du fédéral. Dans ce dossier, Trudeau peut dire non, sans plus, et le Québec n'a qu'à rentrer chez lui tête basse.

Par ailleurs, François Legault s'adresse à un premier ministre fédéral qui suffoque de peur devant une opinion anglo-canadienne largement francophobe et anti-québécoise, que les sondeurs disent prête à propulser massivement au pouvoir la bande à Poilièvre au scrutin de l'an prochain. Pourquoi Justin Trudeau s'effondrerait-il devant le Québec dans un secteur essentiel au projet multiculturel fédéral où le Québec exerce déjà depuis 1991 des pouvoirs considérables arrachés à Ottawa? Comment réagirait le Canada anglais (après tout, Ottawa, c'est son gouvernement national) si «son» premier ministre s'agenouillait devant l'ultimatum québécois en immigration? En peu de temps, il y aurait un putsch chez les libéraux fédéraux.

Mais François Legault sait tout ça. Ça crève les yeux. Même avant de rencontrer Justin Trudeau, il évoquait la possibilité (la certitude?) d'un non d'Ottawa et disait envisager d'autres options, que ce «non» serait jugé inacceptable. Mais diable, quelle option lui reste-t-il ouverte? Il a exclu l'indépendance (bien sûr), mais il écarte tout autant un référendum sectoriel sur l'immigration (qui ne lui donnerait sans doute pas grand chose). Alors quoi? La constitution est contre lui, le fédéral se dressera comme un mur de béton, et les coffres de l'État québécois rougissent à vue d'oeil. Si, ce qui semble fort improbable avec la CAQ, Québec choisit la voie de l'affrontement, que pourra-il faire d'efficace devant le pouvoir politique, judiciaire, financier et militaire du gouvernement central? Pas grand-chose. Accumuler les échecs.

Redessiner la carte constitutionnelle de l'immigration ne sera pas aussi simple qu'abolir l'ancien Conseil législatif en 1968 ou le serment d'allégeance au roi Charles III (2022). Le Québec a alors modifié unilatéralement l'Acte de l'Amérique du Nord britannique (AANB) de 1867, mais seulement dans des domaines qui ne concernaient pas vraiment Ottawa. Il en ira autrement si l'Assemblée nationale décide de modifier unilatéralement la répartition des compétences dans un secteur où la Constitution reconnaît la prééminence fédérale. La voie législative est donc également exclue. 

François Legault a cependant raison quant à l'urgence de la situation. Depuis la conquête, les Britanniques puis leurs successeurs à Ottawa ont utilisé l'immigration comme une arme pour angliciser le pays et nous assimiler. Au nombre des nouveaux arrivants de toutes catégories qui s'installent au Québec, la proportion de francophones baisse à vue d'oeil pendant que la majorité anglo-canadienne renforce sa présence en sol québécois. Aurons-nous survécu pendant 400 ans pour connaître une fin ignominieuse dans un bourbier multiculturel assassin qui impose l'anglais comme langue commune du pays? L'immigration, sous sa forme actuelle, ne favorise pas l'intégration des nouveaux arrivants, elle accélère la désintégration de la culture historique de la nation française et métissée qui a essaimé depuis des siècles à partir du bassin du St-Laurent.

Il n'y a qu'une solution à court terme: élire le Parti québécois en 2026 et cheminer vers l'indépendance. C'est la seule issue qui nous permettra d'exercer les pleins pouvoirs en immigration. D'exercer les pleins pouvoirs en «toutte», de fait! Enfin!


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