«Malgré les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur les arrivées au pays, l'immigration a continué de contribuer à l'accroissement de la diversité linguistique du Canada. Le français et l'anglais demeurent toutefois — et de loin — les langues les plus parlées au Canada; plus de 9 Canadiens et Canadiennes sur 10 parlent l'une des deux langues officielles à la maison au moins régulièrement.»
- communiqué de Statistique Canada, 17 août 2022
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Voilà comment l'agence fédérale Statistique Canada présente la situation au pays dans son premier communiqué sur les données linguistiques du recensement de 2021, alors que ces données dépeignent une chute de la langue française sous des seuils historiques, tant au Québec que dans les provinces à majorité anglophone du Canada.
Si les statisticiens fédéraux pouvaient parler librement sans avoir à «vendre» une orientation politique, ils (elles) sonneraient l'alarme, appelant à l'action immédiate s'il existe toujours, quelque part, une volonté politique d'assurer la protection et la pérennité de la langue française au Québec et au Canada.
Mais de toute évidence, ils sont dans l'obligation de maquiller un déclin du français qui devient aux yeux de tous catastrophique. Les colonnes de chiffres issues des réponses de millions de Québécois et Canadiens peignent effet un sombre tableau qui correspond, malheureusement, à la réalité vécue un peu partout au pays.
Si encore nos médias consacraient des ressources à fouiller les pages du recensement pour décortiquer les données et faire la part des choses, le public serait mieux sensibilisé. Mais peu de journalistes (y en a-t-il un seul?) se donnent la peine, avec la bénédiction de leur direction, de sortir les calculatrices et donner vie aux statistiques.
Peut-être agissent-ils ainsi parce que leurs lecteurs et auditeurs demeurent trop souvent indifférents face aux chiffres des recensements quinquennaux. Après quelques manchettes le jour de leur diffusion et le lendemain, le déclin du français comme langue d'usage et comme langue maternelle n'intéresse plus grand monde...
Et pourtant, derrière chacun de ces chiffres se dissimulent des êtres humains, des familles, des milieux de travail, des comportements, et bien plus. Quand la population de langue maternelle française au Québec a glissé sous la barre des 80% en 2016 il y a bien eu quelques hauts cris, puis rien de plus que des bruits de criquet... Mais voilà qu'au recensement de 2021, on se dirige allègrement vers les 75%... Jusqu'où faudra-il dégringoler pour que quelqu'un, quelque part, prenne les décisions qui s'imposent?
Au Canada tout entier, la proportion des gens qui parlent surtout le français à la maison vient de chuter sous le seuil des 20%. Un moment historique, annonciateur d'un avenir catastrophique pour la langue et la culture françaises en Amérique du Nord. Un moment historique qui se dissout dans l'indifférence générale...
Dans ma propre ville, Gatineau, tout le monde constate depuis des années l'arrivée massive d'Ontariens unilingues anglais. Et nos dirigeants ne font rien. S'en réjouissent. Et voilà que le recensement de 2021 confirme. Depuis 2016, le nombre de Gatinois ne parlant que français a diminuée 3 000 alors que le nombre d'unilingues anglais a bondi d'environ 5000!
En face, à Ottawa, sur l'autre rive de l'Outaouais, la situation des Franco-Ontariens est dramatique. La proportion des habitants ayant le français comme langue d'usage est tombée sous les 10% pour la première fois de l'histoire de la ville. Et à Cornwall, où la population francophone frisait jadis les 50%, elle disparaît à vitesse grand V (21% selon la langue maternelle, 9% selon la langue d'usage).
Je continue de faire les calculs et comparaisons, au Québec et dans les provinces à majorité anglaises, avec la certitude de voir, presque partout, un recul du français. Qu'attend-on pour agir?
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