image provenant du quotidien Le Droit |
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Ce 27 mars, jour du 110e anniversaire du quotidien Le Droit, la directrice générale du journal a annoncé sur les ondes de la station ottavienne Unique-FM 94,5 que l'an prochain, en 2024, la seule édition papier du Droit qui reste - celle, style magazine, du samedi - disparaîtrait pour de bon.
Pas de larme perceptible au coin de l'oeil, pas de trémolo dans la voix pour le bon vieux papier. Le ton de Mme Charrette était enthousiaste. Le virage technologique s'accélère. Il achève, de fait. Et le pied collectif reste sur l'accélérateur. «Nos lecteurs le demandent! On est rendus là!»
Vraiment? À ce point? Ce matin, près des caisses à mon supermarché IGA de la montée Paiement à Gatineau, je jetais un coup d'oeil aux présentoirs de journaux. Oui, les clients en achètent toujours mais l'offre locale en français, auparavant assurée par Le Droit, n'y est plus.
Les francophones de Gatineau peuvent toujours se procurer le Journal de Montréal et Le Devoir, mais on n'y trouvera pas grand chose sur la région de l'Outaouais. La section locale du présentoir est occupée par deux quotidiens de langue anglaise d'Ottawa, le Citizen et le Sun, désormais les seuls disponibles pour les Québécois francophones de Gatineau, devenus orphelins.
Cela signifie, à coup sûr, que des lecteurs et lectrices de langue française qui achetaient un exemplaire du Droit rentrent à la maison avec des journaux dont la réputation francophobe et anti-québécoise n'est plus à faire. Comme si l'influence anglaise n'était pas suffisante à jet de pierre d'Ottawa, on invite littéralement les francophones à s'instruire quotidiennement en anglais.
Mais à croire la direction du Droit, les lecteurs et lectrices ne veulent plus du papier. Ils veulent s'informer sur leurs petits écrans de téléphones cellulaires ou de tablettes. Qui sont les plus fidèles abonnés du Droit? Les «vieux», qui sont de plus en plus nombreux et qui, je suis prêt à parier, préfèrent en majorité un journal imprimé livré à leur domicile ou disponible en kiosque.
Et les autres? Je n'ai pas vraiment eu accès à des données là-dessus pour la région de Gatineau, mais j'ai eu l'occasion de jaser avec quatre ou cinq voisins récemment et j'ai appris qu'aucun d'entre eux n'est abonné au journal. Et quand je vois à l'occasion le livreur m'apporter l'édition papier du samedi (il passe très tôt), il arrive et file à toute vitesse vers je ne sais quelle destination pour la prochaine livraison.
Je serais curieux de connaître le degré de pénétration de l'édition numérique du Droit, du côté ontarien et sur la rive québécoise, et de le comparer au tirage des anciennes éditions quotidiennes en papier. J'ai reçu un coup de fil d'une de mes filles qui réside dans le secteur Kanata de la ville d'Ottawa. Elle m'a informé qu'elle ne recevrait plus l'édition papier du samedi parce que le Citizen (faute de camelots?) mettait fin à ses livraisons à domicile (les copies du Droit voyagent avec le Citizen) dans ce secteur de Kanata.
Mais ce qui m'a le plus surpris, c'est que la personne qui l'a appelée du Droit l'a informée qu'elle était de toute façon la seule cliente du journal dans ce quartier. La population de Kanata (136 000) compte 7% de francophones selon le recensement de 2021 et ce nombre augmente. Et près du quart des anglophones (28 000 personnes) sont bilingues!
Les quelque 9 700 habitants de langue maternelle française sont éparpillés à travers Kanata. Il doit sûrement y en avoir au moins quelques centaines dans le quartier en pleine croissance où demeure ma fille. Un seul abonné de l'édition imprimée du samedi du Droit? Et combien pour l'édition quotidienne numérique?
On ne le saura pas. Les journaux se vantent de leurs chiffres d'abonnement seulement quand les choses vont bien. Et depuis quelques décennies, il est clair que ça va de moins en moins bien...
Pourquoi je parle de ça? Pourquoi suis-je l'un des seuls à parler de ça? Si j'avais des interlocuteurs intéressés, cela donnerait de bons échanges...
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