vendredi 11 novembre 2022

Félicitations, M. Perreault !


--------------------------------------------------------------------------------

Un signe des temps... Le président d'Impératif français, Jean-Paul Perreault, vient d'annoncer qu'il a été expulsé d'un restaurant de Gatineau (hier, 10 novembre) parce qu'il a voulu commander son repas en français. Je salue son courage, parce qu'exiger publiquement du français à Gatineau, 4e ville du Québec, ne vous attire pas une légion de partisans.

Vous risquez plutôt de provoquer l'ire des soi-disant «bon-ententistes», majoritaires ici, pour qui il va de soi de communiquer en anglais avec des anglophones, même sur la rive québécoise de l'Outaouais. Ni les élus gatinois, ni la population francophone, ne monteront aux barricades. Entre-temps, sur les réseaux sociaux, plusieurs n'hésiteront pas à dénoncer ce qu'ils verront comme étant de l'intransigeance de la part de M. Perreault. Sûrement un «séparatiste», ajoutera-t-on...

Si elle se déclenche, la meute injurieuse qui se manifeste souvent sur Twitter, Facebook et les autres aura vite fait de transformer en pauvres victimes la serveuse unilingue anglaise et le propriétaire du restaurant. À leurs yeux, M. Perreault passera pour l'intolérant dans cette affaire, et la «politesse» dont il dit avoir fait preuve sera mise en doute. Comme c'est un militant pour les droits du français, certains prétendront qu'il a sans doute trop insisté, qu'il a peut-être même été désagréable.

J'ai vécu une situation similaire récemment sur Twitter, quand j'ai raconté avoir été servi par un employé unilingue anglais à mon IGA de Gatineau. Je n'ai rien fait de plus qu'insister, très poliment dois-je ajouter, pour me faire servir en français. Après quelques jours de «jeu du téléphone» dans la twittosphère, plusieurs semblaient croire que j'avais malmené un pauvre immigrant au salaire minimum qui faisait de son mieux pour apprendre le français... J'ai dû désactiver mon compte Twitter pour quelques semaines...

Mon expérience, comme Franco-Ontarien jadis puis comme Québécois depuis 47 ans en Outaouais, c'est qu'il n'y a aucune façon agréable de demander d'être servi en français dans un commerce ou une institution qui n'offre pas de services en français. Même si vous arrivez avec un orchestre de violons jouant une petite musique douce, employez un ton ultra sympathique et conservez un sourire doux et inoffensif, il y a de fortes chances que votre interlocuteur soit contrarié. Dans une ville comme Gatineau, où une forte majorité de francophones sont bilingues et où le nombre d'unilingues anglais a doublé en 15 ans, c'est comme ça.

Les propriétaires de commerces savent qu'ils se trouvent au Québec, que la Loi 101 existe, que la population de Gatineau est à 80% francophone, et que plus du quart de la population est unilingue française (cette proportion est en baisse rapide cependant). Mais comme de nombreux anglophones de Gatineau, ils s'attendent - exigent presque - de pouvoir toujours fonctionner en anglais, comme si la métropole outaouaise était une banlieue d'Ottawa. Et ils peuvent le faire parce que la municipalité et la majorité de la population l'acceptent sans rechigner.

Voyez ce qui est arrivé à M. Perreault. Il se trouve dans un restaurant du secteur Aylmer, où le tiers des résidants (ou plus) sont anglophones. Une trentaine de clients et clientes y sont attablés pour le lunch. Je ne suis jamais allé à ce restaurant mais j'imagine que la clientèle mange dans la même salle et qu'on entend ce qui se passe aux tables voisines. M. Perreault a demandé à la serveuse de pouvoir communiquer en français. D'autres clients doivent avoir entendu. Le proprio est ensuite venu et a expulsé le président d'impératif français. Il y avait sûrement des témoins.  Mais personne ne semble s'être porté à sa défense...

En supposant que les deux tiers des clients étaient francophones, on peut raisonnablement croire qu'ils ont tous, sans exception, accepté d'être servis en anglais. Voilà de quoi la «bonne entente» a l'air, dans de nombreux secteurs de l'Outaouais. Et malheur à celui ou celle qui ose perturber cette bonne entente, qui ose créer un malaise public en rappelant que nous sommes ici au Québec et que la langue commune est le français.  Et que la Loi 101 nous donne le droit d'être servi dans la langue officielle et commune: le français.

Surtout, n'allez pas croire que je blâme les anglophones. Contrairement à la majorité des francophones, ils ne se gênent pas pour s'affirmer. J'ajouterais d'ailleurs que très certainement, la moitié des Anglo-Gatinois parlent aussi français et seraient sans doute prêts à vivre ici dans notre langue. Ce sont trop souvent les francophones qui, dès qu'ils perçoivent un accent anglais ou quelque difficulté de compréhension, passent automatiquement à l'anglais. Nous avons été ainsi dressés à l'ombre du Parlement fédéral et de la ville d'Ottawa. Vivre à genoux.

Félicitations, M. Perreault. Nous ne sommes pas assez nombreux à vous appuyer. Mais vous n'êtes pas seul.


1 commentaire:

  1. Ca fait des dizaines d’années que je ne mange pas aux endroits ou on me parle en anglais si tous les Québécois agissaient ainsi le problème serait déjà réglé , mais c’est trop demandé aux pauvres petits Quebecois qui préfèrent éviter l’affrontement…pitoyable

    RépondreEffacer