mercredi 22 novembre 2017
Université de l'Ontario français... les trois murs...
Le projet d'université franco-ontarienne vient de frapper un mur bétonné...
Que dis-je, deux ou trois murs bétonnés...
Pour abattre ces murs, j'ai la conviction qu'avoir raison ne suffira pas... Loin de là...
Les promoteurs de la future «Université de l'Ontario français» auront besoin de puissants béliers...
Qu'ils n'ont malheureusement pas... du moins, pour le moment...
Faisons le point...
D'abord les murs:
Premier mur...
Pendant que la ministre Marie-France Lalonde qualifie «d"historique» l'annonce d'un campus universitaire de langue française à Toronto, et qu'elle lui donne le titre ronflant d'«Université de l'Ontario français» (UOF), les trois organismes qui revendiquent depuis 2012 un post-secondaire sous gouvernance francophone* lui rappellent que l'objectif visé est provincial et doit englober TOUS les programmes universitaires, même ceux des grandes institutions bilingues (Ottawa, Laurentienne)... Dans cet esprit, la petite Université de l'Ontario français devra prendre en main les programmes de langue française du collège Glendon de l'Université York, à Toronto. Un petit pas, quoi...
La réaction des principaux acteurs a été foudroyante. Une fin de non-recevoir sur un ton qui n'invite pas la réplique. La ministre Marie-France Lalonde s'est dite surprise de cette demande, qu'elle carrément qualifiée «d'attaque» contre le collège Glendon, où l'on offre un enseignement de qualité. Quand au principal de Glendon, Donald Ipperciel, non seulement refuse-t-il de transférer ses programmes francophones à l'UOF, mais il affirme qu'à Toronto, la grande majorité des francophones veulent une éducation bilingue... Une université française ne les intéresse même pas... Et vlan!
Imaginez la cinglante réponse de l'Université d'Ottawa, si jamais on lui formule une telle demande...
Alors ce premier mur, c'est ce «NON» catégorique à la principale revendication du RÉFO, de la FESFO et de l'AFO: la gouvernance franco-ontarienne du post-secondaire de langue français, ce qu'on appelle «le par et pour», c'est-à-dire des institutions universitaires et collégiales contrôlées par les francophones et conçues pour les francophones... Hé les tit-gars, les tites-filles, vous aurez votre petit campus à Toronto avec ses 20 profs et 300 étudiants... Dites merci et fermez-la !!!
Deuxième mur...
À lire les comptes rendus médiatiques et les commentaires des politiciens à Queen's Park, il existe un mur d'incompréhension entre les promoteurs de l'université franco-ontarienne et leurs interlocuteurs dans les médias et à l'Assemblée législative ontarienne. «Nous avons déposé un projet de loi, la semaine dernière, pour créer une université de langue française (à Toronto) avec une gouvernance par et pour les francophones pour bonifier l’offre de service et c’est ce que l’on a entendu depuis plusieurs années», a déclaré Mme Lalonde. Une université provinciale, une gouvernance provinciale? Connais pas... De toute évidence, ou elle elle n'a pas suivi le dossier, ou on le lui a mal expliqué, ou elle suit la ligne du parti et simule l'incompréhension...
Une chose est sûre... Si elle et ses collègues se sont abreuvés aux reportages médiatiques, ils ont été généralement mal ou peu (ou pas) informés (sauf peut-être à TFO et Radio-Canada, qui ont offert une couverture moins nébuleuse et plus soutenue). Si les Anglo-Québécois étaient sans université et réclamaient justice, tous les médias - anglais et français - du pays en feraient une manchette à la une... ne manquant pas au passage de rappeler comment les Québécois sont racistes et xénophobes... Mais quand il s'agit des Franco-Ontariens, le silence est assourdissant, tant au Québec qu'au Canada anglais, et les quelques journaux, stations de télé et de radio qui en parlent ont généralement le coeur du message tout croche...
En mars 2016, puis encore en novembre 2017, le RÉFO, la FESFO et l'AFO ont été obligés d'émettre des communiqués de presse (bit.ly/2B6sK1I) pour rappeler aux médias le mandat provincial et global du projet d'université franco-ontarienne, dont on veut qu'elle ait la gouvernance de TOUS les programmes universitaires de langue française, même ceux de l'Université d'Ottawa et de l'Université Laurentienne... Le rappel ne semble pas avoir eu l'effet escompté... On s'accroche à l'essentiel des textes ou reportages précédents, axés sur le campus torontois...
À un certain moment, il va falloir se rendre dans les salles de rédaction pour donner aux journalistes des cours d'université franco-ontarienne 101... C'est un problème majeur parce que le message ne se rend pas au public.
Troisième mur...
Face à un NON retentissant et à une incompréhension quasi-totale des demandes, les promoteurs du projet d'université franco-ontarienne ont besoin de munitions pour faire sauter les digues (au sens figuré bien sûr puisque je suis un pacifiste intraitable). Leur argumentaire est parfait. Tous, toutes reconnaîtront qu'au niveau des principes, la position du RÉFO, de la FESFO et de l'AFO sont justes et équitables. Mais personne n'osera toucher aux méga-structures bilingues et anglo-dominantes au sein desquels l'immense majorité des étudiants et étudiantes franco-ontariens peinent à retrouver des petits coins de francophonie...
Alors il faudra des appuis. Des appuis puissants, suffisamment en tout cas pour ébranler la structure actuelle du milieu universitaire ontarien. En attendant de pouvoir mobiliser des manifs de 10 000 personnes comme à l'époque Montfort, il faut utiliser tous les moyens disponibles pour intensifier la pression sur les décideurs. Il faudrait dès maintenant identifier des individus, des organisations, des médias sympathiques et les pousser à fouiller cette question, à publier des reportages, chroniques, blogues et éditoriaux. Où? En Ontario bien sûr, mais aussi au Québec, en Acadie et au sein des collectivités francophones de l'Ouest canadien. En France, aux Nations Unies, à l'OIF, partout où l'on voudra entendre les doléances franco-ontariennes...
Ce troisième mur, l'absence de mobilisation qui ferait de ce dossier un enjeu national et même international, ne pourra être abattu facilement. C'est un peu David contre Goliath... Mais on sait qui avait gagné ce combat... Et aujourd'hui, au lieu des frondes et des petites pierres, on a l'Internet, les réseaux sociaux et d'autres moyens de communication qui décuplent la force médiatique des individus qui apprennent à bien s'en servir...
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* le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO) et l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario (AFO)
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