lundi 22 avril 2019

Le Devoir et la laïcité. Je suis déçu.


Quand le directeur du Devoir, Brian Myles, s'approprie deux colonnes complètes en page éditoriale, c'est qu'il accorde beaucoup d'importance au thème qu'il aborde. Et cette importance se voit décuplée quand la plume du grand patron sert à modifier, voire dénoncer, une position prise quelques semaines plus tôt par un de ses propres éditorialistes.

Il s'agit, en l'occurence, de l'appui ou de l'opposition du Devoir au projet de loi sur la laïcité de l'État du gouvernement Legault. Le premier éditorial, signé Robert Dutrisac et publié le 29 mars 2019, portait le titre «Un projet de loi légitime» (bit.ly/2FzjQgo).

Tout en affirmant la conviction que l'interdiction de signes religieux n'aurait pas dû s'appliquer aux enseignants (sans donner de motif), le ton du texte reste sympathique, Le Devoir y voyant «une avancée majeure» et «une tentative légitime de proposer un modèle de laïcité qui, selon son appréciation, fait consensus au sein de la population». Certes, ajoute l'éditorialiste Dutrisac, (le projet) «restreint des droits individuels, mais c'est pour accomplir un objectif de paix sociale dont le pouvoir politique, dûment élu, doit se soucier.»

Dans sa conclusion, le texte du Devoir donne aussi son aval au recours à la clause nonobstant, qui protège le projet de loi de poursuites en vertu de la Constitution canadienne. «Ce projet, écrit-on, est aussi affaire de liberté politique. Il affirme que la nation québécoise a "des valeurs sociales distinctes" - ce sont les mots de la Cour suprême dans le jugement Nadon - "et un parcours historique spécifique l'ayant amené à développer un attachement particulier à la laïcité de l'État". Bref, qu'en cette matière, cette nation peut aspirer à un modèle différent du reste du Canada.»

Puis, deux semaines plus tard, le samedi 13 avril, après le dérapage de nombreux opposants au projet de loi 21 (manif à forte teneur islamiste, le «nettoyage ethnique» du maire de Hampstead, menaces de désobéissance civile, etc.), Le Devoir passe du camp de la bienveillance à celui de l'hostilité envers la version caquiste de la laïcité de l'État. On ne sait trop pourquoi. Une chose est sûre: ce revirement signé Brian Myles constitue un camouflet à l'éditorialiste Robert Dutrisac.

À la lecture du second éditorial intitulé «Un sain dialogue est souhaitable» (bit.ly/2X7BLlt), dont l'inspiration semble bien plus montréalaise que nationale, on retrouve la quasi-totalité de l'argumentaire sur lequel se fondent les adversaires d'une véritable laïcité et neutralité de l'État. «Non, écrit-il dès le départ, il n'y aura pas de consensus possible au Québec sur le projet de loi 21 du gouvernement Legault.» Bien sûr, cela crève les yeux. Mais n'est-ce pas tout à fait normal? Dans tout grand débat de société (p. ex. la Loi 101), il n'y a jamais de consensus et à un certain moment, une décision doit être prise. La démocratie, quoi!

Dans son deuxième paragraphe, le directeur du Devoir poursuit son avancée en terrain très glissant, affirmant que «quoiqu'il advienne, une majorité de Québécois, hors de Montréal, appuiera la CAQ dans son intention de limiter le port de signes religieux». Je n'ai vu qu'un sondage récent sur cette question, celui de Léger publié le 29 mars, et les résultats indiquaient un appui majoritaire au projet de la CAQ, même dans la métropole. Le tir croisé incessant des adversaires de la laïcité, dont la puissance médiatique se concentre à Montréal, peut donner l'impression d'une opposition majoritaire mais la réalité ne soutient pas cette thèse.

L'argumentaire s'embourbe davantage quand M. Myles déclare que «les Québécois ne sont pas plus racistes ou xénophobes que la moyenne» et que leur conception de la laïcité résulte, entre autres, d'un «anticléricalisme acquis après s'être libéré du poids de l'Église catholique». Ayant été victime de racisme pendant plus de 200 ans, la nation canadienne-française devenue québécoise est presque par définition anti-raciste. Pour ce qui est de la xénophobie, je laisserai à d'autres le soin de décider si notre résistance à l'agression constante de l'anglosphère constitue un geste d'hostilité envers les autres, ou plutôt une légitime défense devant l'hostilité des autres. Par ailleurs, en matière d'anticléricalisme, j'ai toujours cru que nous étions passés rapidement de l'intégrisme catholique à l'indifférence religieuse. J'ai oeuvré en journalisme au Québec pendant 45 ans et j'ai rencontré très, très peu d'anticléricaux.

L'éditorialiste du Devoir se reprend en dénonçant avec justesse les «propos outranciers et méprisants pour les Québécois» du maire de Hampstead, William Steinberg, et du «prédicateur de l'intolérance» Adil Charkaoui, puis sent immédiatement le besoin de souligner que ces deux attiseurs de braises ne parlent pas au nom des collectivités anglophones et musulmanes. Et il en rajoute: «Il faudra en revenir, un de ses jours, de cette manie d'interpréter les défis contemporains du Québec dans l'intégration des minorités à partir d'une grille de lecture inspirée par la peur des régimes islamistes». On se croirait presque dans la salle éditoriale du Globe and Mail de Toronto, qui avait renommé «Québec's hijab law» le projet de loi 21 sur la laïcité de l'État.

L'histoire du Québec et du Canada démontre assez clairement que le principal défi d'intégration des «minorités» au Québec a toujours été d'ordre linguistique. Les immigrants qui ont appris à vivre dans notre langue et qui ont fait leur notre cheminement historique ont été reçus à bras ouverts et leur apport nous a lentement mais sûrement métissés depuis la conquête. Le combat pour la laïcité, en cours depuis des siècles, est planétaire et universel. Il n'est lié à l'identité que dans la mesure où on l'adapte à la société d'un territoire donné. Et dans ce contexte, la «peur» des islamistes déborde largement nos frontières.

Rendu là dans son argumentation, la table était mise pour asséner le coup de masse au projet de loi 21. Plus question ici de la «légitimité» affirmée par son collègue Robert Dutrisac quelques semaines plus tôt. Le directeur du Devoir ne dit même pas s'il approuve la laïcité, s'étant contenté de rappeler le soutien du quotidien au compromis Bouchard-Taylor. Il reconnaît tout au plus le «droit» du gouvernement Legault de «limiter» le port des signes religieux aux agents de l'État qui exercent des fonctions coercitives. Mais, écrit-il, réaffirmant une position déjà énoncée le 29 mars, le gouvernement «va trop loin en étendant cette mesure aux enseignants».

Avec le paragraphe suivant, la marmite déborde et Le Devoir bascule nettement dans le camp des adversaires de la laïcité de l'État. Le texte n'aborde nulle part le principe même de l'État neutre et laïc. «Il n'y a aucun lien de causalité entre le port du voile ou autres symboles religieux et le prosélytisme dans les salles de classe», écrit-on. Même en supposant que M. Myles ait raison, en quoi cela change-t-il le fond du débat sur la laïcité? Un État laïc peut réclamer d'en avoir aussi l'apparence, jusque dans les codes vestimentaires. Et que penser d'un employé de l'État, notamment en position d'autorité comme un enseignant, pour qui le port d'un signe religieux est plus important que la fonction qu'il occupe?

«Le bienfait de cette interdiction reste à démontrer, comme le fait remarquer Gérard Bouchard catastrophé par cette loi "radicale" et ce débat "cadenassé" par le recours à la disposition de dérogation en amont du débat», poursuit le directeur du Devoir, faisant siens les propos excessifs martelés par Gérard Bouchard. Une loi «radicale»? Selon toutes les définitions du mot, ce projet n'est pas radical. Si le gouvernement Legault voulait d'un État véritablement laïc, il interdirait les signes religieux pour l'ensemble des représentants de l'État. Et il faudrait expliquer comment le recours au nonobstant «cadenassera» un débat qui dure depuis plus d'une décennie et qui se poursuivra sans verrouillage bien après l'adoption de la future Loi 21.

Le Devoir conclut en concédant tout au plus que le projet du gouvernement Legault «peut encore tenir la route sans les enseignants» et sans menace de bâillon. «Il est de la responsabilité du gouvernement de s'élever au-dessus de la mêlée, et de permettre un débat franc et ouvert (...). Au Québec, on vit aussi dans le dialogue», conclut-il. Mais c'est à s'étouffer. Personne ne veut - ni ne peut - empêcher un débat «franc et ouvert». Quant à l'appel au dialogue, il faudrait le transmettre à ceux et celles qui font les pires dérapages depuis quelques semaines. Les seuls qui semblent authentiquement ouverts à un «sain dialogue» ces jours-ci sont les partisans de la laïcité. M. Myles aurait pu, aurait dû le noter.

Pour ce qui est de «s'élever au-dessus de la mêlée», c'est un excellent conseil que Le Devoir, notre quotidien national, aurait pu faire sien. Il m'a semblé, en lisant cet éditorial, que l'auteur avait beaucoup de difficulté à s'élever au-dessus de Montréal. J'ai toujours de hautes attentes en lisant un éditorial du Devoir, encore davantage quand la plume du directeur s'attaque à un débat de fond. Je suis déçu.

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Note en bas de page... Comparez à ce qu'écrivait l'ancien directeur du Devoir, Bernard Descôteaux, le 5 octobre 2013, dans le cadre du débat sur la Charte des valeurs du Parti québécois:

«Il serait de fait assez facile aujourd’hui de trouver un consensus construit sur le plus petit dénominateur commun que sont les quatre éléments suivants : 1. reconnaissance juridique de la neutralité de l’État à l’égard des religions ; 2. adoption de règles régissant l’octroi d’accommodements dits raisonnables ; 3. interdiction du port du voile intégral pour recevoir ou donner des services publics ; 4. interdiction du port de signes religieux ostentatoires par des agents de l’État ayant des fonctions coercitives comme les policiers et les juges.

S’en tenir à cela serait occulter le débat du port de signes religieux par les agents "ordinaires" de l’État, tout particulièrement celui sur le port du voile. On est là au coeur du débat. On ne trouvera sans doute pas une réponse dans une acceptation ou une interdiction universelle du port de signes religieux. Au contraire, il faut porter un regard sur la dimension politique que peuvent avoir certains d’entre eux.

Comme le signale dans nos pages ce samedi Nadia Alexan, une professeure retraitée d’origine égyptienne, ce bout de tissu n’a rien d’anodin. Il "véhicule le prosélytisme d’un islam fanatique et totalitaire", écrit-elle. Ce serait se voiler les yeux de croire que le Québec échappe totalement à ce prosélytisme. Ne peut-on se demander si l’interdiction du port du voile ne devrait pas être étendue aux écoles, les enseignants étant des personnes en exercice d’autorité ? »



samedi 13 avril 2019

Le sabordage du renforcement de la Loi 101

Éditorial – Le Droit, édition du mercredi 20 novembre 2013

Le sabordage

par Pierre Allard

Dans le fracas qui continue de marquer le parcours du projet de loi péquiste sur la laïcité et la neutralité religieuse de l’État, la décision du gouvernement Marois de saborder ce qui restait du du projet de loi 14 modifiant la Charte de la langue française est passée relativement inaperçue. Et c’est dommage, parce que la Loi 101, adoptée en 1977, charcutée par les tribunaux, usée par l’inaction, avait besoin d’une mise à jour.

Que l’on soit d’accord ou pas avec les mesures que la ministre Diane De Courcy avait présentées en décembre 2012 n’a jamais été le cœur du problème. Le différend entre les partis était bien plus profond. Il ne s’agissait pas de savoir s’il était opportun de renforcer la Loi 101, mais bien de s’interroger sur la justification même du projet. Et là-dessus, le Parti libéral du Québec (PLQ), et à un moindre degré la Coalition Avenir Québec (CAQ), ont répondu par la négative. Pour l’Opposition, essentiellement, la langue française n’est pas en danger au Québec.

Le parti de François Legault avait adouci sa position et permis au projet de loi 14 de faire un bout de chemin, mais en fin de compte, la CAQ aurait refusé de franciser les petites entreprises de 26 à 49 employés, de contester le statut bilingue des municipalités ne répondant plus aux critères de la Loi 101 et d’entraver l’entrée d’étudiants francophones dans les cégeps anglophones. Mme De Courcy aurait-elle dû étirer les pourparlers dans l’espoir d’un compromis ? Peut-être, mais les positions du PQ et de la CAQ sur ces questions paraissaient plutôt fermes.

Non, ce qui inquiète dans tout cet épisode, c’est la lecture de la situation sur le terrain par les partis politiques, y compris le PQ. Ce dernier a profité du débat sur le projet de loi 14 pour amorcer une réflexion sur le programme d’anglais intensif en sixième année, mais sans grande conviction. Le gouvernement Marois ne s’oppose toujours pas au principe de bilinguiser la dernière année du primaire francophone, en dépit des dangers que cela pose dans des régions comme l’Outaouais et Montréal, où l’anglais est omniprésent.

Les positions les plus préoccupantes sont toutefois celles du Parti libéral, qui s’est montré insensible aux avis d’experts sur l’érosion du français langue de travail et aux données du recensement de 2011, où se côtoient la fragilité de la francophonie et la robustesse de l’anglais. Selon le chef du PLQ, Philippe Couillard, c’est une « idée pernicieuse » de présenter le bilinguisme « comme une menace à notre société », alors que partout ailleurs dans le monde, le fait d’être bilingue ou même trilingue constitue « un atout indispensable ». Tous les jeunes Québécois doivent avoir accès à cet « atout essentiel », dit-il.

Au-delà de l’inexactitude de cette affirmation, la vaste majorité de la planète étant unilingue, cette notion du bilinguisme ne tient pas compte de la situation particulière du Québec, îlot francophone dans une mer nord-américaine anglophone et unilingue. Dans les pays européens où bilinguisme et plurilinguisme sont répandus, et à l’occasion majoritaires, la langue nationale n’est pas menacée comme langue commune et les répercussions identitaires sont à peu près nulles. Les Néerlandais et Suédois bilingues restent linguistiquement néerlandais et suédois.

En Amérique du Nord – et les minorités canadiennes-françaises et acadiennes peuvent en témoigner – la bilinguisation massive s’accompagne d’un glissement identitaire et d’une assimilation à l’anglais. Après quelques générations, une part importante des francophones devenus bilingues s’anglicise, et les descendants sont le plus souvent unilingues… anglais. Entre bilinguisme et plurilinguisme par choix, toujours souhaitable, et le bilinguisme imposé que nous subissons, il y a toute une différence. Il y a pertes d’identité.

Quand les politiciens auront compris cette mouvance, déjà aux portes du Québec, un nouveau projet de loi 14 franchira – avec les modifications qui s’imposent – toutes les étapes législatives.



  

mardi 9 avril 2019

Laïcité. Une loi incomplète, mais il ne faut pas céder!

Image TVA Nouvelles

S'il fallait choisir un camp dans ce capharnaüm d'invectives qui embrouille le débat sur la laïcité, j'appuierais sans doute le projet de loi 21 du gouvernement Legault, mais en me pinçant le nez.

D'abord les fleurs. Le gouvernement de la CAQ se comporte en gouvernement «national» et non en succursale provinciale. Il énonce le caractère fondamental de la laïcité de l'État québécois. Il associe cette laïcité à un principe tout aussi fondamental, l'égalité hommes-femmes. Et il affirme la souveraineté de l'Assemblée nationale en la matière, soustrayant sa loi aux dictats d'une cour suprême nommée par le premier ministre fédéral.

Maintenant les pots. On a fait de la laïcité une composante de l'identité québécoise. Une erreur grave. Secundo, les articles les plus controversés de la loi (interdiction des signes religieux, visage découvert) s'appliquent à certains représentants de l'État, y compris les enseignants, mais pas à d'autres. L'État se donne un visage laïc par ci, et autorise les signes religieux par là...

Je ne cacherai pas ma préférence pour la Charte de de laïcité et de neutralité religieuse proposée en 2013 par Bernard Drainville sous l'éphémère gouvernement Marois, laquelle interdisait seulement les signes religieux «ostentatoires», mais étendait cette interdiction à l'ensemble du personnel de l'État, avec une période de transition sans clause grand-père.

Une loi trop modérée...

Le gouvernement Legault affirme que sa loi se veut modérée, donc davantage susceptible de créer un certain consensus. Oui, certes, mais seulement au sein de la majorité, parfois enthousiaste, parfois tiède, qui l'appuie. La colère haineuse qui caractérise les adversaires les plus militants de la laïcité de l'État s'est manifestée dans toute sa vigueur en dépit des efforts de modération. Accusations de racisme, de xénophobie, appels à la désobéissance civile, tout y est. Ce n'aurait pas été pire avec une loi à la Drainville...

Le traumatisme de la laïcisation aurait été intense avec une loi qui s'applique dans tous les organismes publics, mais la poussière serait vite retombée. Avec ce que propose la CAQ, les caméras, micros et stylos des scribes anglo-canadiens (et francophones) transformeront en martyrs chaque personne portant voile, kippa, turban ou croix qui se voit refuser un emploi d'enseignant. Ça ne finira jamais.

L'illogisme d'une laïcité partielle deviendra vite apparente quand le citoyen passera de l'école laïque à l'hôpital ou au bureau d'un ministère, où il pourra être servi par un personnel tout à fait libre de vous mettre sa religion (ou son athéisme) en pleine face. Cela dans un État qui se dit laïc...

Le volet identitaire

Maintenant la question identitaire. Il y a à peine soixante ans, on entendait encore couramment au Québec l'expression «la langue gardienne de la foi». Quoi? Jusqu'à la révolution tranquille, la religion faisait partie de notre identité nationale et aujourd'hui elle est remplacée par la laïcité? La réalité, c'est que notre identité comme peuple est fondée principalement sur la langue et la culture françaises, ainsi que sur 400 ans de vivre-ensemble. Pas sur la religion.

Jusqu'à la rébellion des Patriotes, le peuple savait envoyer paître les évêques quand il le fallait. Durant la grande noirceur intégriste qui a marqué le siècle suivant, le clergé catholique anglo-canadien a laissé clairement savoir aux francophones, et notamment aux Franco-Ontariens, que l'Église catholique ne serait jamais son allié identitaire. Et au cours du dernier demi-siècle, l'évacuation des religieux du domaine public s'est faite sans heurts, dans une continuité identitaire. La Loi 101 est devenue notre seul clocher.

Le combat mondial pour la séparation de l'Église et de l'État est en marche depuis des siècles et prend des formes particulières selon le continent, le pays, l'histoire et les valeurs. La laïcité ne fait pas partie des identités nationales. C'est plutôt l'identité nationale de chaque peuple qui façonne la laïcité sur son territoire, ou l'absence de laïcité selon le cas. L'évolution vers l'État laïc touche l'humanité entière.

Les sondages et les commentaires dans les médias et réseaux sociaux pan-canadiens indiquent d'ailleurs que la laïcité de l'État trouve des partisans dans une portion plus qu'appréciable de l'opinion anglo-canadienne. Si c'était la majorité, et ce le sera un jour, devra-t-on dire que la laïcité est devenue une composante identitaire de la «nation» canadienne-anglaise? Ou simplement une nouvelle avancée en terre nord-américaine d'une cause qui déborde largement pays et continents?

Alors quand le projet de loi 21 affirme que «la nation québécoise a des caractéristiques propres (dont) un parcours historique l'ayant amenée à développer un attachement particulier à la laïcité de l'État», il ouvre inutilement une boîte de Pandore et donne libre cours à l'hostilité de tous ces groupes qui contestent le droit de la majorité québécoise de se donner un pays à son image.

Trop tard pour reculer

Cela dit, il est trop tard pour reculer. Depuis plus de 250 ans, notre peuple n'a jamais été raciste. Il a été victime de racisme aux mains de l'occupant britannique, puis d'une majorité anglo-canadienne qui s'est toujours considérée supérieure et qui n'hésitait pas jadis à nous lancer des Speak White... Encore aujourd'hui, nos anciens Rhodésiens et les nouveaux arrivants qu'ils ont assimilés ne peuvent supporter d'obéir à la volonté des anciens porteurs d'eau et scieurs de bois.

Cette loi a beau demeurer faible et incomplète, elle a tout au moins le mérite d'édicter enfin le noble principe de la laïcité de l'État, et de l'appliquer. Là-dessus, il ne faut surtout pas céder!













lundi 8 avril 2019

Laïcité. Et si les Anglo-Canadiens étaient favorables...

Dans le titre de son éditorial du 29 mars (tgam.ca/2G1fMqL), le quotidien «national» du Canada anglais, le Globe and Mail de Toronto, a fait preuve de mauvais goût, voire de mauvaise foi en appelant le projet de loi québécois sur la laïcité «Quebec's hijab ban». Si l'équipe éditoriale espérait un appui massif de ses lecteurs et lectrices pour sa dénonciation du gouvernement Legault, elle a dû se gratter la tête en lisant les commentaires publiés sur le site Web du Globe...

Je n'ai pas fait de décompte, mais le nombre d'interventions favorables à la loi sur la laïcité me semblait égal ou supérieur à celles en faveur de ses adversaires, et le ton de ces derniers ne versait pas dans l'hystérie et le délire des déclarations du maire de Hampstead, de Charles Taylor ou de nombreux manifestants soi-disant antiracistes à Montréal.

J'offre ici à titre d'exemples certains commentaires inclus à la suite de l'éditorial, sur les pages Web du Globe and Mail. Je ne serais pas surpris qu'ils soient tout aussi représentatifs de la société anglo-canadienne que ceux des multiculturels-tous-azimuts qui aiment bien nous traiter de racistes et de xénophobes. Un sondage pan-canadien sur la question réserverait peut-être des surprises...

Opinions de lecteurs et de lectrices du Globe, publiées dans les heures et les jours qui ont suivi la parution de l'éditorial opposant Quebec's hijab ban...

1. It's not unreasonable for the state to require public servants to keep their religious affiliation to themselves when they are on the job. Why is this different from banning public servants from advertising their political views when carrying out their public duties? E.g. we accept that Post Office employees can't wear an NDP badge on the job or a Che Guevara t-shirt. Likewise, as the Canadian Judicial Council ruled not long ago, it is not permissible for judges to enter their courtroom wearing a Make America Great Again cap.

Public servants are free to affirm their religious or political convictions on their own time, but not when they're on the job.

(c'est signé Stephen)

2. It's not a Charter violation any more than a dress code is.

(Ambrose)

3. What part of the separation of church (Synagogue, mosque, temple......) and state do people not understand?

(Bernie)

4. Religion is a private matter; keep it to yourself. I do not want to be served by someone wearing White Supremacist symbols, or by anyone pushing any other mythology in my face.
My beliefs are no-one else's business; I don't want to know about yours.

(RSH)

5. Canada is a democratic multicultural society where people are totally free to practice their religion. Freedom of religion, however, also means that individuals ought to be free from religion when dealing with government officials. There is no moral, ethical or Charter issue here - it is simple separation of “church and state” and is fundamental to supporting a true democracy.

(Eric)

6. Let's pose a simpler question: Should your 4 year-old child's kindergarten teacher be allowed to wear a niqab? That would be quite a drop-off on the first day of school.

Whether the Quebec government hasn't gotten it right (do government clerks have to be included?), I couldn't tell you, but it is a debate worth having.

(Rocky)

7. I believe every country has a right to manage secularism and religion within its own borders. In Canada's case this means Quebec has that right. Secondly, what Quebec is proposing is normal in many European countries, including Germany. Angela Merkel endorsed Germany's burka ban and other restriction on religious symbols in schools and other govt institutions. Finally, it's the public service, not a religious service.

(Richard)

8. I don't think that at this time, the G&M should add to its Quebec-bashing spree all the more so since the great majority of Quebeckers are in favour of the legislation and my feeling is that in a secret ballot, most real Canadians would agree as well.

(Dunrob)

9. I thought the charter ensured that men and women are equal? When I see a woman in the burqas it is a symbol of oppression by men..... like a flag or logo symbols.....

Equality of men and women in Canada takes priority over religion.....

(Jill and Terry)