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| Rolande Faucher (photo Prise de parole) |
J'ai jasé avec Rolande Faucher pour la dernière fois il y a quelques mois, le 25 septembre, à l'occasion du lancement de la saison 2025-2026 du Centre de recherche sur les francophonies canadiennes (CRCCF*), à l'Université d'Ottawa. Ses états de service au cours du dernier demi-siècle (voir liens médiatiques en bas de page) faisaient d'elle une invitée de marque partout où elle passait.
Elle méritait pleinement les nombreux postes de commande qu'elle a occupés en Ontario français et les multiples honneurs qui lui ont été décernés au fil des ans. Son accueil chaleureux, son érudition et son regard lucide sur la réalité franco-ontarienne dont elle était issue faisaient de Mme Faucher un interlocuteur privilégié pour quiconque voulait s'informer des grands enjeux de la francophonie en Ontario.
Tous et toutes lui rendront hommage à leur façon mais je crois que ce qui reste le plus longtemps après notre départ vers l'au-delà, ce sont nos écrits. Je laisse donc ici quelques extraits d'un texte qu'elle a signé en 1998 intitulé L'université et la francophonie dans lequel elle livre un plaidoyer éloquent pour la création d'une véritable université de langue française en Ontario.
Vous comprendrez facilement que l'institution qu'elle réclame n'a rien à voir avec le micro-campus torontois offert comme les miettes de la table aux Franco-Ontariens et qu'on a pompeusement baptisé Université de l'Ontario français...
Je laisse donc la parole à Rolande Faucher, en espérant qu'un jour, son espoir se réalise:
«Je fais donc un plaidoyer pour une culture universitaire française pleine et entière en Ontario, affirmant par là son absence dans les universités bilingues de la province. J'affirme comme corollaire à ce plaidoyer qu'une société moderne ne peut se passer d'une telle culture qui lui soit entièrement dédiée, que son absence brime son développement; comme conséquence, que l'absence d'une culture universitaire française en Ontario retarde le développement de la communauté franco-ontarienne.»
(...)
«Identifier l'absence d'une culture universitaire française pleine et entière dans les universités bilingues n'est pas refuser de reconnaître le rôle constructeur qu'ont assumé certains leaders de ces universités en vue d'accorder une place plus importante au français dans leurs programmes et leurs services, c'est pleurer l'énergie non dédiée à assurer à ces programmes et à ces services toute l'importance qu'ils méritent.
«C'est reconnaître qu'il existe dans ces universités des lieux privilégiés dédiés à la francophonie (je nommerai l'institut franco-ontarien à Sudbury et le Centre de recherches en civilisation canadienne-française (CRCCF) à l'Université d'Ottawa) mais c'est souffrir de l'absence de toutes ces autres initiatives qui n'ont pas vu le jour, qui ne verront pas le jour, parce que ces universités sont préoccupées à gérer leur bilinguisme.
«Combien d'initiatives ont été discutées, initiées, abandonnées, réactivées dans le but de soutenir le bilinguisme institutionnel: Comité des affaires francophones, Conseil de l'enseignement en français, structure bicamérale, Comité de bilinguisme.
«Refuser de reconnaître cette lacune dans l'élaboration d'un système d'éducation d'ailleurs à peu près complété en Ontario, c'est être aveugle face à un système déficitaire qui perpétue la discrimination systémique historique contre les francophones en Ontario, c'est choisir d'ignorer une réalité cruelle qui ne fait qu'empirer.»
(...)
«Année après année, et de depuis 1969, des voix se font entendre dans la communauté pourréclamer une université de langue française. Est-ce pourtant lè un projet utopique? Un document rédigé par la professeure Anne Gilbert, en 1990, pour le compte de l'Association canadienne-française de l'Ontario (ACFO), faisait état de ressources qui existaient au sein des universités bilingues** et qui pourraient être récupérées dans une éventuelle université française.
«On y faisait mention de la clientèle existante, des programmes d'études, de la recherche, des professeurs et administrateurs, tous des facteurs qui permettraient la création d'une université française qui pourrait se comparer favorablement, par ses nombres à un grand nombre d'universités en Ontario. On y faisait aussi mention du financement qui, si on allait chercher ce que la province (de l'Ontario) accorde présentement aux universités bilingues pour l'enseignement en français, placerait côté budget cette éventuelle université devant sept universités anglaises de la province.»
(...)
«Il ne manque au projet de complétude institutionnelle franco-ontarienne éducative qu'un maillon, mais un maillon de taille: l'université française. Seulement avec une telle université pourrons-nous parler de véritable culture universitaire pleine et entière en Ontario.»
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* Le CRCCF s'appelait autrefois le Centre de recherche en civilisation canadienne-française.
** Les universités bilingues (en 1998) - Université d'Ottawa, Université Laurentienne, Université de Sudbury (aujourd'hui française), Collège Glendon
Liens aux textes médiatiques sur Mme Faucher:
Radio-Canada: https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2191412/rolande-faucher-ottawa-mifo-acfo-deces
ONFR: https://onfr.tfo.org/deces-de-rolande-faucher-batisseuse-franco-ontarienne/

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