lundi 25 mars 2024

La langue de bois du CISSSO

Capture d'écran du site Web Le Droit

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«Jugeant qu’il y avait "urgence d’agir" pour le bien-être des usagers de deux résidences privées pour aînés (RPA), le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais (CISSSO) a octroyé un contrat de plus de 70 000 $ pour "accompagner" les exploitants de la Résidence et Château de l’Île et du Village Riviera.» (texte de Justine Mercier sur le site Web Le Droit, 24 mars 2024 - voir lien en bas de page

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Je crains toujours, avec la vieillesse, de perdre un jour la capacité de m'indigner... Puis je lis un texte comme celui de l'excellente Justine Mercier dans Le Droit et me revoilà, comme un ressort tout neuf, prêt à bondir sur les barricades comme à 20 ans... J'ai la certitude que Mme Mercier a inclus dans son article tout ce qui lui était permis d'écrire, mais ce qui n'y est pas, ce que l'on dissimule, ne peut manquer de rappeler les horreurs ayant marqué nos «usines de vieux» durant les premiers mois de la pandémie de COVID-19, en mars et avril 2020.

N'a-t-on rien appris de la tragédie qui a décimé des milliers de nos personnes âgées en RPA et CHSLD dans des conditions atroces exacerbées par les lourdes bureaucraties et l'opacité de l'information filtrant du réseau québécois de la santé, et notamment des centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS et CIUSSS)? Or voilà qu'apparaissent dans deux résidences de Gatineau une «urgence d'agir» pour assurer la qualité des soins et la sécurité des résidents les plus vulnérables, ceux et celles en perte d'autonomie.

Mais n'essayez pas d'en savoir plus. On nous pardonnera de nous inquiéter un peu étant donné que le Groupe Katasa, propriétaire de ces deux résidences, le Village Riviera et la Résidence/Château de l'Île, est le même qui dirigeait le tristement célèbre CHSLD Herron, dans l'ouest de l'île de Montréal, où plus de 40 personnes sont mortes au printemps 2020. L'enquête publique avait démontré que les problèmes de pénurie d'équipements et de personnel existaient à cet endroit bien avant la prolifération de la COVID-19.

Le texte dans Le Droit indique l'octroi d'un contrat de 71 600 $ à un cabinet en gestion d'entreprise de la région montréalaise avec mandat «d'accompagner» (ça veut dire quoi?) la direction de ces résidences pendant au moins trois mois. Et que le motif du CISSSO était «l'urgence d'agir rapidement» dans le cadre juridique d'une «situation d'urgence où la sécurité des personnes ou des biens est en cause». Le CISSS fait état de «visites d'appréciation de la qualité» et de «certains constats», sans en dire davantage. Entre ça et cacher sciemment au public des faits dont il devrait être informé, la ligne est mince...

L'article du Droit est signé par une reporter de l'équipe d'enquête. L'information ne provient donc pas d'une conférence de presse ou d'un communiqué du centre intégré de santé et de services sociaux. Et même une fois interrogé par la journaliste, le CISSSO semble avoir fait tout pour révéler le moins possible à la population. On ressort l'éternelle langue de bois qui mine la crédibilité des déclarations officielles depuis trop longtemps: «mise en oeuvre d'un plan d'amélioration concerté», «établir un niveau de soins optimal et de qualité». Le charabia habituel des bureaucrates... inacceptable quand de l'avis même du CISSSO, on a jugé qu'il y avait «urgence d'agir»...

Faudrait qu'on attrape nos dirigeants de CISSS par le collet et qu'on leur dise: on se souvient des crises récentes, de nos vieux pris en otages dans un régime inefficace, souffrant, mourant seuls dans ces résidences et CHSLD. On aurait dû en savoir davantage, et plus vite. Alors si des personnes en perte d'autonomie cognitive ou physique sont de nouveau en danger dans des résidences qu'il faut «accompagner» pour assurer la qualité des services, des soins et leur sécurité, criez-le sur tous les toits. Convoquez la presse au lieu de la fuir. L'État et ses organismes doivent protéger avant tout les citoyens, les aînés en particulier, et non les entreprises et les établissements à qui l'on a confié, en partie ou en tout, leur garde.

Si ce n'est que pour obliger le groupe Katasa à honorer l'engagement proclamé dans son site Internet: «Chez KATASA, nous avons vos intérêts à cœur et nous traitons chacun comme un membre précieux de notre famille.» 

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