mardi 20 décembre 2022

«On va chanter à souère...»



L'expérience est sûrement arrivée à tout le monde... Assister à un excellent spectacle où des voisins bruyants vous empêchent de l'apprécier à sa juste valeur... ou qui, à la limite, gâchent votre soirée.

Cela a un peu le même effet qu'autrefois, il y a très longtemps, quand nous allions à la messe et qu'un bébé (ou plusieurs) criaient et pleuraient du début à la fin de la cérémonie. On aurait voulu dire aux parents de les faire taire, mais on savait que ces derniers faisaient leur possible et que leur dire des bêtises ne ferait qu'aggraver la situation.

Dimanche soir, à la salle Odyssée de la Maison de la culture de Gatineau, mes nerfs ont été mis à rude épreuve toute la soirée. La personne assise sur le siège voisin se comportait comme si elle était seule dans une pièce avec un interlocuteur dur d'oreille...

Dans une salle bondée où des centaines de personnes jasent et chuchotant en même temps, le grondement des voix est indistinct. Mon épouse et ma belle-soeur se parlaient avant le début du spectacle Noël une tradition en chanson, et je n'entendais pas leur conversation.

Mais la voix de ma voisine de droite, parfaite inconnue jusque là, portait au moins sur deux ou trois rangées de sièges. J'aurais dû me méfier dès que je me suis assis. «On va chanter à souère», a-t-elle lancé à sa compagne sur un ton qui ne laissait aucun doute sur ses intentions.

Puis, pendant les 15 ou 20 minutes qui restaient avant que le concert débute, j'en ai beaucoup appris (comme les dix ou 15 personnes les plus proches d'elles) sur le colon irritable d'un membre de sa parenté, ce dont j'aurais pu me passer, et des recherches Internet des deux voisines sur les causes du colon irritable et leurs savantes hypothèses sur le meilleur moyen d'y remédier...

Les spectateurs autour ont aussi tous très bien entendu qu'elle ne mangeait pas de desserts (apparemment bon pour la digestion), sauf peut-être un peu de crème glacée de temps en temps...

J'étais heureux quand les musiciens sont arrivés sur la scène et que les premiers airs de Noël ont provoqué des applaudissements qui ont mis fin aux palabres des voisins. Mais j'ai aussitôt sursauté quand ma voisine bruyante a crié : Oh, regarde... C'est Johanne Blouin! C'était en effet Mme Blouin... et je savais que ma soirée serait longue.

Je ne me souviens pas très bien avec quelle chanson cette dernière a lancé le spectacle, mais je sais que ma voisine chantait d'une voix plus forte (et un peu moins juste) que celle de Johanne Blouin. Je me suis tourné vers elle et vu, dans ses yeux et son gestuel, qu'elle vivait une expérience très intense. Le ressenti de ses voisins n'avait aucune importance.

Les choses ne se sont pas améliorées à la fin de la première chanson. Je n'entendais que Oh wow! Oh wow! à ma droite jusqu'à ce Johanne Blouin (ou l'une de ses co-vedettes) mette fin aux applaudissements et lance un Bonsoir! au public. On s'attend à une réponse de la salle, mais le Bonsoir! de ma voisine a sûrement été entendu par les musiciens au fond de la scène...

Je comprenais maintenant ce qu'elle allait faire quand elle a dit avant le spectacle: On va chanter à souère... Je n'ai rien contre les gens qui chantent avec les artistes. Cela donne des moments très forts aux prestations des Cowboys fringants, et plusieurs chansons de Noël sont bien connues de l'ensemble du public. Mais j'ai devant moi d'excellents musiciens et des artistes de renom (Joe Bocan, Martine St-Clair, Luce Dufault, etc.) que j'entends rarement en personne et que je voudrais pouvoir apprécier sans me faire casser les oreilles par la personne qui occupe le siège voisin.

Je n'ai rien dit, j'ai enduré. Vers la fin, elle avait baissé le ton, sans doute parce qu'une personne ou deux lui avaient suggéré de freiner un peu ses ardeurs.  Reste qu'en sortant, mes plus vifs souvenirs de la soirée n'étaient pas la magie musicale de Noël sur scène, mais le colon irritable d'une parfaite inconnue, les Oh wow! interminables et les prestations bruyantes (mais sincères et enthousiastes) d'une voisine que j'espère ne plus jamais voir près de moi à la salle Odyssée.

Joyeux Noël à tous, toutes!


2 commentaires:

  1. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  2. Dans le temps, je me souviens que ceux-ci se ramassaient dans un bar à l'entrée de Limbour!

    Les soirées se finissaient généralement par un 《free for all!》, style Joe Montferrand.

    C'était dans ma folle jeunesse, mais j'en garde de vif souvenir... et je vous épargne les détails. ;)))

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