Jusqu'à récemment, si on m'avait demandé ce que je savais de Trois-Rivières, j'aurais répondu : pas grand-chose... Que c'était la deuxième plus ancienne ville de la Nouvelle-France, fondée en 1634... Que l'industrie des pâtes et papiers y était florissante jadis... Que son plus célèbre ressortissant, Maurice Duplessis, avait gouverné le Québec pendant une vingtaine d'années... Que l'autoroute 40 y fait de drôles de virages en se jumelant à la 755 et qu'il faut éviter de se retrouver sur le pont Laviolette si on roule vers Québec...
Il aura fallu que le Cirque du Soleil choisisse de rendre hommage à mon idole Guy Lafleur dans le magnifique amphithéâtre Cogeco de Trois-Rivières pour que je séjourne enfin quelques jours dans la capitale trifluvienne, en juillet, et que j'en découvre les attraits avec mon épouse Ginette et deux grands amis, mon ancien collègue journaliste Claude Tremblay et son épouse Jacqueline Lavoie.
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...à notre arrivée au musée Boréalis |
Ce jeudi 20 juillet, donc, nous étions au musée Boréalis, aménagé sur les rives de la rivière Saint-Maurice dans l'ancienne usine de filtration de la Compagnie internationale de papier (CIP - prononcer Ci-aille-pi) au coeur de Trois-Rivières. La jeune guide, débordante de connaissances et davantage d'enthousiasme, faisait revivre l'histoire des hommes et des machines de l'industrie mauricienne des pâtes et papier du 19e et du 20e siècle.
Pendant qu'elle nous racontait les dangers que couraient les draveurs, le plus souvent âgés de 12 à 17 ans, je me suis souvenu qu'un de mes arrière-grands-pères, Alfred Longpré, était mort à la drave en 1924 en tentant de sauver un de ses camarades. Et que jusqu'aux années 1980, d'immenses estacades de billots encombraient les rivières des Outaouais et Gatineau, jusque devant le Parlement canadien.
L'impressionnante réplique d'une machine à papier conservée au Musée Boréalis a ravivé mes souvenirs de visites aux anciennes usines de papier journal et de pâte à papier de la CIP et de la James MacLaren à Gatineau, Masson et Thurso. Jadis, du Pontiac à la Petite-Nation, les rives de l'Outaouais étaient ponctuées des cheminées d'usines de l'industrie forestière. Encore aujourd'hui, on produit du papier à Hull, Gatineau et Masson sous les enseignes Kruger, Produits forestiers Résolu et White Birch.
La différence entre Gatineau et Trois-Rivières, c'est qu'au pays de Jos Montferrand la mémoire et l'identité font défaut. Au-delà des efforts sisyphiens d'une grappe d'historiens et archivistes, le paysage historique est trop souvent désolant. Les municipalités et le gouvernement québécois n'ont pas fait leur boulot. La ville de Gatineau préfère défigurer les rives outaouaises avec des tours d'habitation et des édifices à bureaux, pièges à Ontariens qui font le bonheur d'entrepreneurs cupides tout en sonnant le glas d'anciens quartiers francophones.
...un cours d'histoire à l'ancienne prison de Trois-Rivières |
Nos élus auraient pu nous accompagner sur la rue des Forges, une des artères principales au coeur du vieux Trois-Rivières. Transformée en voie piétonnière sur près d'un kilomètre, débordant de commerces, de restaurants, cafés et bistrots, cette «grand-rue» devient un incontournable lieu de rencontres et de bouffe, surtout durant la belle saison. Encore une fois, rien de semblable n'existe à Gatineau, où les anciennes villes désormais fusionnées n'ont pas levé le petit doigt pour conserver les quartiers historiques qui auraient pu léguer aux générations actuelles au moins deux ou trois «rue des Forges»...
...sur la rue des Forges |
Enfin... Je reviens au fil conducteur... Nous allions à Trois-Rivières pour voir l'hommage du Cirque du soleil à Guy Lafleur. L'excellent spectacle avait lieu dans l'impressionnant amphithéâtre extérieur couvert Cogeco... un lieu absolument magnifique et fort animé, situé devant le fleuve Saint-Laurent. Encore une fois, j'ai songé qu'il n'existait rien de semblable à Gatineau, qui dispose amplement d'espace pour une telle construction sur les rives de l'Outaouais. Le Cirque du soleil aurait pu y offrir son «Guy! Guy! Guy!» plus près de la patrie du célèbre hockeyeur, où l'on n'a pu faire mieux que donner son nom à l'autoroute la plus mal fignolée du Québec.
Notre guide au musée Boréalis nous avait expliqué qu'avec le déclin de l'industrie papetière, Trois-Rivières a dû s'interroger sur sa vocation et avait décidé de miser sur la culture. Quelle merveilleuse idée! En 1997, la ville a donc créé Culture Trois-Rivières, avec mission «de développer, promouvoir et rendre accessible l’offre culturelle et artistique», tant pour les Trifluviens que pour les visiteurs de l'Outaouais et d'ailleurs. Pas grand risque que cela arrive à Gatineau, où les tuyaux d'égout ont toujours eu préséance sur la culture chez la majorité de nos élus, et où l'identité québécoise francophone s'écrapoutit sous l'ombre anglicisante d'Ottawa.
Vous aurez compris que Trois-Rivières m'a ébloui. J'y ai vu ce qu'on peut faire pour mettre en valeur l'héritage culturel, économique et politique d'une région québécoise qui compte près de 400 ans d'histoire européenne. Un exemple à suivre pour bien des régions, y compris la mienne...
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...devant l'amphithéâtre Cogeco |
Lien au musée Boréalis https://www.borealis3r.ca/?gclid=Cj0KCQjwoeemBhCfARIsADR2QCsYyxL50X07yjtLdUAXhH4V9Ge3jSf_eQNYgneJb_KPorgBrlnMUtgaAuQ5EALw_wcB
Lien au Musée Pop https://museepop.ca/
Lien à la vieille prison https://museepop.ca/vieille-prison/horaire-et-tarifs
Lien à l'amphithéâtre Cogeco https://www.amphitheatrecogeco.com/
Lien à Tourisme Trois-Rivières https://www.tourismetroisrivieres.com/fr
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